Non, l’opéra français du 19ème siècle n’est pas ringard : la preuve !
C’est une très belle soirée qui nous est offerte ce jeudi à la Philharmonie de Paris. "Le Romantique Opéra français" : tout un programme, riche de promesses qui, pour la plupart d’entre elles, sont tenues. Et c’est plein de joie et d’énergie que l’on ressort de ce concert.
Cette réussite, on la doit tout d’abord à la cohésion du plateau vocal et orchestral : autour de Marc Minkowski et de ses Musiciens du Louvre Grenoble, un bouquet de jeunes talents déjà confirmés : Julie Fuchs (soprano), Marianne Crebassa (mezzo-soprano), Stanislas de Barbeyrac (ténor), Florian Sempey (baryton) et Nicolas Courjal (basse). Il faut dire qu’à l’exception de ce dernier, tous sont des habitués de la baguette de Marc Minkowski. Leur complicité est évidente : ils ont du plaisir à être là, à jouer, à chanter, à diriger, et cela se sent.
Savamment élaboré, l’itinéraire de ce voyage nous fait parcourir la riche histoire de l’opéra français, de Gluck à Massenet, en passant par les "tubes" de Berlioz, Thomas, Meyerbeer, Bizet, Delibes, Offenbach, Gounod… mais en nous faisant aussi découvrir – ou redécouvrir – des compositeurs moins connus, tels Poniatowski, Méhul, ou Dietsch. Une excellente façon d’attirer vers l’opéra un public néophyte, largement présent ce soir.
D’emblée le ton est donné par le « Nobles seigneurs, salut ! », extrait des Huguenots (Meyerbeer), chanté avec conviction et énergie par Marianne Crebassa. Sa voix noble, sensuelle, puissante, son timbre d’une beauté franche et sans artifice, ainsi que sa superbe diction font merveille, non seulement dans cet air, mais aussi dans « Nuit resplendissante » extrait de Cinq-Mars (Gounod) et « Vois sous l’archet frémissant », air de Nicklausse dans Les Contes d’Hoffmann (Offenbach). Et que dire du « Duo des Fleurs » de Lakmé (Delibes), interprété avec Julie Fuchs ? Un bouquet de printemps en plein hiver, composé par deux voix complices qui s’assemblent fort joliment !
Julie Fuchs est, elle aussi, animée d’une belle énergie : si elle s’amuse dans le « Duo de la Mouche » d’Orphée aux Enfers (Offenbach et dans l’air du « Cours-la-Reine » de Manon (Massenet), elle nous offre aussi un sublime « Robert, toi que j’aime » de Robert le Diable (Meyerbeer). Cet opéra est d’ailleurs trois fois présent ce soir, et ce n’est pas un hasard, puisque, créé à l’Opéra de Paris en 1831, Robert le Diable est une œuvre fondatrice de l’opéra romantique français, qui influença bon nombre de compositeurs, parmi lesquels Bizet, Wagner et Verdi.