Belle soirée au programme d'un Orchestre de Chambre de Lausanne invité à Genève : Prokofiev et sa Symphonie « classique », Saint-Saëns et son virtuose concerto et enfin l’explosive 2e Symphonie du grand Beethoven.
Quel étonnement de voir la silhouette de grand adolescent de Santtu-Matias Rouvali arriver sur scène d’un pas virevoltant… Le talent n’attendant pas les années, le jeune finnois a déjà à son actif une belle carrière en dirigeant parmi les orchestres les plus renommés : Philarmonia, Philarmonique Royal de Stockholm, Radio France, de la BBC, Bamberg, entre autres.
En introduction, une belle 1ère Symphonie de Serge Prokofiev qui offre à entendre un Orchestre de Chambre de Lausanne très homogène sous la baguette de Santtu-Matias Rouvali: gestes souples et fluides, il inspire à l’orchestre une ouverture facétieuse à souhait, malgré quelques délicatesses aux premiers violons dès les premières mesures. Le Larghetto est charmant de bout en bout et la Gavotte royalement inspirée de gestes suspendus du chef au pupitre!
La course folle du Molto Vivace a ravi par ses belles dynamiques : tout a bel et bien swingué, les vagues successives sont admirablement bien dosées, faisant penser aux meilleures pages d’un Ivan le Terrible ou Alexandre Nevsky.
L’introduction du Concerto pour piano n°2 de Camille Saint-Saëns, interprétée sous les doigts de Louis Schwizgebel, est dense et l’orchestre y répond avec autant de gravité. Malgré quelques délicatesses aux violons, l’Orchestre de Chambre de Lausanne offre un écrin très homogène au piano élégant du soliste genevois. On notera globalement des cordes soyeuses et souples, mais des timbales caractérisées par une certaine dureté et sécheresse dans leur approche, une petite harmonie un peu pâle manquant peut-être de son parfois - exception faite à la flûte solo brillante et particulièrement musicale.
L’Allegro scherzando fait bien ressortir l’aspect facétieux et vif du pianiste. Le thème, royal, est onctueux aux basses, on apprécie la belle fluidité des arabesques entre solistes de l’orchestre et piano. Le Presto offre ce petit côté diabolique à une pièce qui ne ménage pas les difficultés pour le pianiste, mais qui convient parfaitement à Louis Schwizgebel. Sa musicalité est un plaisir et son toucher nous épargne une rudesse toujours possible dans ce genre de pièces un brin extérieures. Il semble cependant subsister au fil des concerts un léger déséquilibre de la main gauche, et l'on regrette que fassent parfois défaut des graves plus charpentés, qui permettraient d’offrir un piano plus tellurique.
La Symphonie n°2 de Beethoven fait briller la belle ductilité des cordes, malgré des basses parfois un brin pâteuses et manquant quelque peu de jus en fin de 1er mouvement. Le Larghetto, assez allant, effleure le lyrisme sans trop y vouloir toucher, et laisse peu émerger un basson pris dans la gangue orchestrale. Le Scherzo est très homogène, d’une belle dynamique, le bloc des vents dans un bel échange avec les cordes. L’énergie de l’Allegro molto vient enfin surchauffer le son du tutti, masquant peut-être par son énergie le hautbois, le basson et plus généralement des vents manquant alors de reliefs.
La soirée fut en somme stylistiquement impeccable, relevant le beau son de l’Orchestre de Chambre de Lausanne magnifiquement emmené par l’énergie enthousiaste du chef Santtu-Matias Rouvali, bien qu'il ait par moment un peu mis à mal l’équilibre de l’orchestre.