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Béatrice cherche son Bénédict au Festival Berlioz

Von , 05 September 2022

Fondé par Serge Baudo en 1979 et pris en charge depuis 2009 par Bruno Messina, le Festival Berlioz œuvre pour le rayonnement culturel de l’Isère ; en marge d’une programmation invitant chefs et artistes du monde entier sur la scène semi-ouverte de l'emblématique château Louis XI, il offre aux étudiants issus des établissements supérieurs de musique un original outil de formation avec le Jeune Orchestre Européen Hector Berlioz créé en 2010. Ce 30 août, l’opéra-comique en deux actes Béatrice et Bénédict sera donné par l’Orchestre philharmonique de Strasbourg et le chef américain John Nelson, deux grands spécialistes du répertoire berliozien au concert et au disque.

John Nelson dirige Béatrice et Bénédict au Festival Berlioz
© Bruno Moussier

Fruit du coup de foudre dont Berlioz fut frappé en découvrant Shakespeare, l’œuvre est une libre adaptation de Beaucoup bruit pour rien dans laquelle le musicien laisse libre cours à son humeur badine et spirituelle. On pourra regretter que les dialogues soient ce soir remplacés par un simple résumé (procédé déjà utilisé dans la version gravée par Daniel Barenboim en 1982) auquel le comédien Éric Génovèse apporte cependant toute sa verve et sa force de conviction. L’ouverture menée tambour battant par John Nelson nous plonge au cœur de ce « caprice écrit à la pointe d’une aiguille » selon les propres mots de son auteur ; les superpositions rythmiques remarquablement articulées en soulignent l’esprit malicieux, l’équilibre entre vents et cordes rend justice aux textures extravagantes de l’écriture, ce soir l’Orchestre philharmonique de Strasbourg prend possession de l’espace sonore tout en privilégiant la lisibilité des détails les plus ténus. La sicilienne promène ses facétieux contretemps avec délicatesse et précision, les enchaînements parfaitement négociés rappellent la longue familiarité du chef américain avec un répertoire dont il saisit si bien les codes narratifs.

Béatrice et Bénédict au Festival Berlioz
© Bruno Moussier

Héro noble et touchante, la soprano Vannina Santoni livre un « Je vais le voir » sobre et exempt de pathos dont la cadence finale légèrement tendue trahit cependant l’émotion d’un début de concert ; au fil de l’œuvre la voix gagnera en rondeur. La mezzo Sasha Cooke campe une Béatrice sensuelle et mutine, l’onctuosité du timbre idéale dans l’élégie n’exclut pas la virtuosité. À cet égard, l’air « Il m’en souvient » révèle une palette de nuances admirable et un français impeccable. Irisé de tendres couleurs moirées, l’instrument de la mezzo Beth Taylor s’en tient à un unique caractère mais quelle profondeur de sentiment s’en dégage ! La magie du duo avec Héro « Nuit paisible et sereine » souligne la maîtrise du souffle et une projection souveraine.

Sans doute due à une fatigue passagère, la prestation du ténor Toby Spence déçoit, le chanteur marque plus qu’il ne chante et semble ce soir embarrassé par les exigences de la partition jusqu’à en perdre la précision rythmique... Le sémillant Bénédict semble absent à lui-même. Dans les rôles plus mineurs de Claudio et de Don Pedro, les barytons Jérôme Boutillier et Paul Gay s’amusent visiblement, leur duo « Ah ! l’étrange folie » ne manque pas de panache. Poussant plus loin la truculence, la basse Julien Véronèse est un maître de chapelle dans la veine d’un Bacquier, son très attendu air du « vin de Syracuse » bénéficie du concours d’un chœur formidablement réactif. Préparé par Nicole Corti, Pascal Adoumbou et Tanguy Bouvet, le chœur Spirito brille autant dans le grotesque épithalame « Mourez, tendres époux » que dans le dynamique « Le More est en fuite ». Cachés derrière la scène, dialoguant librement avec les solistes ou brandissant d’humoristiques pancartes, quelques membres du chœur se prêtent avec aisance à une scénographie spirituelle et fluide. Les applaudissements nourris du public salueront longuement cette très estimable production.

Béatrice et Bénédict au Festival Berlioz
© Bruno Moussier


Le voyage de Philippe a été pris en charge par le Festival Berlioz.

***11
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“un chœur formidablement réactif”
Rezensierte Veranstaltung: Château Louis XI, Cour, La Côte-Saint-André, am 30 August 2022
Berlioz, Béatrice et Bénédict (concert performance)
John Nelson, Musikalische Leitung
Spirito
Sasha Cooke, Béatrice
Toby Spence, Bénédict
Jérôme Boutillier, Claudio
Vannina Santoni, Héro
Paul Gay, Don Pedro
Beth Taylor, Ursule
Julien Véronèse, Somarone
Éric Génovèse, Erzähler*in
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