Quasi coup d’envoi du week-end de la Fête de la Musique en Ville de Genève, c’est une foule de jeunes qui vient envahir la scène du Victoria Hall pour ce quatrième projet « Orchestre en classe » : pas moins de 80 jeunes instrumentistes, encadrés par 20 musiciens de l’Orchestre de la Suisse Romande ainsi que 80 jeunes choristes, viennent interpréter deux œuvres du compositeur Etienne Perruchon, Kienta Kien et Tchikidan. Quelle belle énergie et quelle relève ! Les œuvres s’articulent sur un langage imaginaire, les jeunes chanteurs donnent de la voix, de l’énergie, les musiciens cadrent le tout d’une extraordinaire bienveillance, à l’instar du percussionniste Michael Tschamper qui veille à toutes les entrées de ses petits protégés, comme le lait sur le feu ! Un bonheur à voir sous la direction attentive d’Arsène Liechti qui mène le tout d’une énergie communicative !
Place aux adultes avec la très beethovénienne Symphonie n°1 en ut majeur de Georges Bizet. L’Allegro vivo introductif ronfle à merveille sous la direction énergique de Kazuki Yamada. Les scansions des cuivres sont très nettes, les vents alertes, les cordes très homogènes. Avec l’introduction de l’Adagio, nous retrouvons l’envoûtement du hautbois de Nora Cismondi : boisé à souhait, le son est naturellement vibré, et dans une humaine rondeur, le chant s’épanouit dans un lyrisme sans boursouflure. Disons-le : l’Orchestre de la Suisse Romande a trouvé là une perle qui éblouit l’auditeur immanquablement. L’Allegro vivace est empoigné avec énergie et truculence par le chef dont la direction alerte vient couronner la virtuosité des violons qui se surpassent dans ces motifs en double-croches d’une efficacité admirable.
C’est avec la Symphonie n°3 en ut mineur de Camille Saint-Saëns que se poursuit ce voyage très français : après la densité des premières mesures, ce sont les palpitations des cordes qui viennent nous cueillir dans l’Allegro moderato et, malgré un manque de hiérarchisation des forte ici et là dans les pupitres de cuivres, toute l’œuvre est parcourue d’un souffle épique. Le chef Kazuki Yamada parvient à susciter une très belle atmosphère dans le Poco adagio, relevé par l’orgue aux beaux effets de Diego Innocenzi ainsi que le cor suave d’Isabelle Bourgeois.
L’Allegro moderato offre une belle course qui n'est pas sans rappeler la fameuse « Bacchanale » de Samson et Dalila. Les énergies sont globalement bien dosées, et une certaine jubilation envahit le public. Grand retour de l’orgue dans le Maestoso qui fait montre de sa toute puissance, apaisement élyséen et beaux motifs du piano à quatre mains d'où surgit le spectre du grand Beethoven de la Fantaisie pour chœur et piano dans une sorte de choral hiératique ; l’émotion est à son comble et la musique peut alors déployer son final dans une grandiloquence qui ne quittera plus la pièce, relayée par un Orchestre de la Suisse Romande dont les différents vents et cuivres brillent par une virtuosité sans faille. L’esprit français aura bel et bien brillé lors de cette soirée de début d’été genevois !