Encore une fois, l’Orchestre National du Capitole de Toulouse a su nous convaincre de sa qualité exceptionnelle en nous faisant découvrir trois œuvres trop peu jouées du répertoire postromantique.
La Sinfonietta de Leoš Janáček s’ouvre par un mouvement fort justement dénommé Fanfare. Cet hommage aux forces armées tchécoslovaques surprend d’autant plus qu’il faut un moment pour comprendre d’où vient cet air martial : treize cuivres se sont placés au fond de la première galerie, accentuant l’impression de dualité entre la guerre et la paix évoquée par le reste de l’orchestre. Les quatre mouvements suivants sont inspirés par la ville de Brno. L’écriture rappelle les deux quatuors du compositeur, avec une alternance de danses populaires au Château, de douces mélodies au Monastère de la reine brusquement interrompues par les trompettes de la fanfare, les cris stridents des flûtes dans la Rue, pour revenir à la fanfare qui ferme le ban dans la Mairie. Il faut toute la technique des musiciens et toute la précision de la direction de Tugan Sokhiev pour rendre avec grâce une succession de climats aussi divers.
Bohuslav Martinů a composé son concerto pour alto et orchestre alors qu’il était en exil aux Etats-Unis, ce qui explique certainement les grandes envolées lyriques, nostalgiques, et résolument tonales même si quelques chromatismes et quelques cassures de rythme viennent surprendre. Pendant la longue ouverture orchestrale très romantique, Antoine Tamestit esquisse déjà quelques mouvements, presque des pas de danse qui souligneront sa sensibilité tout au long de sa brillante interprétation. Malgré sa tessiture assez grave, l’alto n’est jamais couvert par l’orchestre qui est pourtant très présent. Et on peut apprécier en permanence sa sonorité chaude. Mais c’est surtout pendant les cadences qui ponctuent chacun des deux mouvements que l’altiste nous montre toute sa virtuosité. L’œuvre s’achève sur un pianissimo, et le temps semble s’arrêter, suspendu à la baguette soudain immobile du chef. Le répertoire pour alto n’est pas très vaste ; Antoine Tamestit nous offre en bis une interprétation pleine de sensibilité d’une Sarabande extraite des suites pour violoncelle de Bach.