Fondateur en 1821 de la tradition de l’opéra romantique allemand, Der Freischütz s’ouvre par un déchaînement des éléments musicaux. Nous voici transportés dans des contrées lointaines, hostiles et surnaturelles où le pire semble possible. Des mélodies populaires tempèrent toutefois cette ouverture sombre, présage d’une fin plus harmonieuse.
L’action du Freischütz se situe vers le milieu du XVIIe siècle peu après la Guerre de Trente ans au moment où apparaissent les premières volontés d’unification allemande. Un thème cher aux Romantiques et à Weber, à la suite des guerres napoléoniennes. On retrouve également dans cet opéra d’autres thèmes fondateurs du romantisme allemand : le surnaturel, la nature, la forêt et la chasse. Quiconque pénètre dans la forêt entreprend une quête qui aboutit au Bien ou au Mal selon les choix qui sont faits.
Si la version concert de cet opéra ne permet pas de rendre compte par le décor de ces éléments, l’orchestre s’y prête à merveille, sous la direction ample et précise de Thomas Hengelbrock. L’orchestre s’illustre tant lors des mouvements d’ensemble que lors des duos violoncelle – Agathe et alto – Annette. Il sait se faire doux lorsque nécessaire, vigoureux ou inquiétant, tout en respectant les voix des chœurs et des solistes.
Le chœur, quoiqu’à l’étroit sur la scène, montre également une très belle maîtrise des chants, tour à tour vindicatif et moqueur face au chasseur Max, inquiet lorsque Max pénètre dans la forêt ou apaisé lors du jugement de l’Ermite. Le choix de remplacer les dialogues parlés par un texte de l’écrivain allemand contemporain Steffen Kopetzky traduit en français et lu par Graham F. Valentine – dont la chevelure rousse rappelle les légendes sur le Malin – était audacieux et clivant. Si ces textes permettent d’introduire dès le début Samiel et laissent planer une aura maléfique sur l’opéra, ils introduisent des interludes trop nombreux qui peuvent finir par agacer.