« Soirée post-romantique » à l’Opéra des Nations, lors de laquelle Sara Mingardo, contralto transalpine, nous conviait à un voyage dans l’univers de Mahler, Brahms, Enescu et Wagner, accompagnée du pianiste lusitanien João Paulo Santos ainsi que par l’altiste allemande Diemut Poppen.
C’est donc à une version avec piano que nous sommes amenés à découvrir l’interprétation de la cantatrice de ce cycle sur des poèmes de Friedrich Rückert : ces « chants des enfants morts » est œuvre âpre, puissante, remémorant la mort prématurée des frères et sœurs du compositeur, et qui frappera encore, quelques années plus tard, celle de sa fille Maria. De nos jours, ce recueil est un incontournable, il fut enregistré à moult reprises par les plus grands chanteurs de Lied et la gageure est grande de se voir comparé à ces illustres collègues.
Le « Nun will die Sonn’so hell aufgehn » offre à entendre le timbre magnifique de la chanteuse : boisée, sombre mais en même tant d’un métal éclatant, on apprécie le style impeccable, les portati sensibles, le velouté de la voix. Dans les aigus, la chanteuse amortit la voix d’une manière souple et délicate, ce qui offre de bien beaux phrasés, tout en legato. Le « Oft denk’ich, sie sind nur ausgegangen », espoir insensé du retour impossible, est coulant à souhait, « In diesem Wetter, in diesem Braus » plus véhément, manque de relais au piano.
La voix soyeuse de Sarah Mingardo, d’une beauté éclatante, possède les qualités des grandes contraltos, mais demeurent néanmoins, tout au long du cycle, quelques lacunes: la permanence de ce pupitre et du regard plongé sur la partition, coupant inéluctablement le contact avec la salle. Son allemand souffre d’un texte peu exposé, de consonnes peu sonores, pas assez percutantes, et du texte, on ne goutte pas assez les allitérations et les jeux de sonorités. Par ailleurs son accompagnateur reste bien en retrait dans une musique si puissante et on aurait aimé un piano qui suscite plus, qu’il pousse plus loin la chanteuse… Ce ne fut pas le cas malheureusement, João Paulo Santos se bornant à suivre, et ne tirant de son piano que peu de couleurs, Sara Mingardo ne forçant pas le trait non plus du post-romantisme mahlérien.