Loïc Touzé a choisi de mettre en scène deux danseuses et un danseur sur les Variations Goldberg de Bach, interprétées en direct sur le plateau du Théâtre de la Bastille par Blandine Rannou.
Le visage fardé de blanc et les lèvres rehaussées de rouge, les trois danseurs exécutent des mouvements, lentement, en fixant le public de leurs grands yeux entourés de noir. La scène est nue et le clavecin en fond de scène, au centre, montre que la musique est la source première d’inspiration du spectacle.
Le choix du chorégraphe s'est apparemment porté davantage sur un jeu de pantomime et d'expression du visage que sur la danse. Un danseur imite ainsi à un moment un cavalier ; d’autres scènes semblent rire de la gymnastique, les danseurs exécutant de grandes préparations en prenant l’air effrayé avant de faire la roue dans toute la largeur du plateau. On peine cependant à voir le fil directeur qui relie ces idées décousues entre elles. Il est étonnant de voir de la pantomime sans contexte car l'humour de ce genre spectaculaire repose habituellement sur un jeu avec des codes et des cadres – qui sont ici totalement absents. Le ton de la pièce est donc déroutant et assez flou, tandis que l’alchimie entre le clavecin et les danseurs dans des accoutrements rappelant le mime Marceau ne prend pas.
La chorégraphie très fragmentée suit diverses idées : tourner avec des bras ronds, mêler les bras et les jambes avec ceux des autres danseurs jusqu’à s’en défaire. Les bras font parfois penser à ceux de la danse baroque : très bas en effectuant des mouvements de poignets. Les mains fardées de blanc sont aussi mises en avant. La plupart des mouvements semblent faire référence à des chorégraphes du XXe siècle : des bras évoquent le style Cunningham, des petits sauts ressemblent à ceux des chorégraphies de Dominique Bagouet. Mais aucun style ne semble franchement émerger ou dominer le spectacle. Les passages les plus intéressants sont ceux qui mettent en contact les trois danseurs qui, le reste du temps, adoptent souvent des mouvements similaires mais chacun sur une zone du plateau. Les danseurs paraissent aussi imiter des pantins désarticulés ; une certaine fixité des visages accentue alors la déconstruction du mouvement, qui n’est ici ni fluide ni énergique ou rythmé.