Les premiers chants semblent venir du fond des âges, émanations d’une religion millénaire. Dans la basilique assombrie, le public se retrouve semblable à celui de 1715 écoutant les supplications de cette procession d’hommes qui traversent le lieu, chantant a cappella des chants latins. Une impression renforcée par les premières notes, sous la direction ample de Leonardo Garcia Alarcón, qui nous entrainent dans un voyage nostalgique et triste tandis que du kyrie se dégage une ferveur religieuse troublante. Un voyage dans l’Ancien Régime et ses fastes funèbres.
Les cérémonies funèbres qui accompagnaient les souverains dans leur dernière demeure figuraient parmi les grandes cérémonies de l’Ancien Régime dont la basilique de Saint Denis servait de théâtre jusqu’à la Révolution française. Ainsi, les pompes funèbres de Marie-Thérèse d’Autriche, épouse de Louis XIV, en marquèrent en 1683 l’apogée. A l’automne 1715 la basilique résonna des lamentations dédiées aux funérailles de Louis Le Grand. C’est cette cérémonie qui était proposée par le Festival de Saint-Denis, sur la base de documents d’époque.
Le dispositif musical comprenait trois entités distinctes, qui alternaient régulièrement sur un répertoire propre. Un fonctionnement repris par le metteur en scène et le scénographe Mathieu Coblentz et Jean Bellorini avec une alternance de plain-chant (chant a cappella), chœurs et orchestre, et intermèdes théâtraux.
La direction musicale de Leonardo Garcia Alarcón respecte les instruments, les voix et les solistes, sans que les voix ne soient recouvertes, belle retranscription des motets de Lully et de leur symbiose entre musique et chants. Les voix du chœur Vox Cantoris donnent une belle colorature tant à l’offertorium qu’à l’Agnus Dei. La partie la plus fervente et la plus emblématique concerne les chants et notamment le De profundis de Lully où la soprano Chantal Santon Jeffery se démarque par une belle tenue des aigus, un son cristallin et la beauté de sa voix.