La nouvelle production des Pêcheurs de perles confiée par l’Opéra de Saint-Étienne à Laurent Fréchuret s’écarte très nettement de la plage de Ceylan prescrite par les librettistes Eugène Cormon et Michel Carré pour l’opéra de Bizet. Après un court film de pêcheurs apnéistes projeté pendant les premières mesures, le rideau argenté se lève sur un espace sombre meublé de chaises et de lits, un renard empaillé sur l’un deux, et quelques habits suspendus aux cintres. La scénographie de Bruno de Lavenère nous laisse ce soir dans l’ancienne cité minière stéphanoise, les plus nombreux vêtements accrochés plus tard nous évoquant, sans hésitation, la salle des pendus où séchaient les vêtements des mineurs après leur poste de travail. On ne voit toutefois pas bien la pertinence de ce choix, certes original, mais qui jure régulièrement avec la luxuriance qu’on associe habituellement à l’ouvrage.
On s’interroge aussi plus d’une fois sur les écarts entre action sur le plateau et texte chanté, comme le premier tableau d’un statisme complet et déprimant, pendant que les chœurs s’époumonent « Dansez, dansez jusqu’au soir ». À partir de la fin du premier acte, le châssis métallique géant qu’on amène sur scène, avec Leïla perchée au sommet, n’améliore pas non plus la poésie des images. On préfère finalement le premier tableau du troisième et dernier acte, rideau argenté abaissé et Zurga en avant-scène, qui enchaîne avec son dernier face-à-face avec Leïla. Notons également la performance en direct du peintre Franck Chalendard qui met un peu de couleurs aux surfaces noires des cloisons, pour un joli résultat mais pas spécialement surprenant.
Le plateau vocal n’est pas complètement homogène mais il présente déjà l’avantage, étant intégralement français, d'offrir une bonne compréhension du texte. Catherine Trottmann séduit d’emblée en Leïla, avec un timbre d’une grande pureté, une musicalité très précise et une bonne technique pour exécuter trilles et passages vocalisés. On entend que les notes les plus graves de sa partie ne sont pas les plus confortables, mais le chant reste correctement exprimé, tandis que l’aigu sonne avec un supplément de puissance.
Nadir est un rôle qui convient a priori idéalement à Kévin Amiel, doté d’un format de ténor plutôt léger. La ligne vocale est conduite avec élégance, mais on remarque quelques petits défauts dans l’intonation. Sa romance « Je crois entendre encore » est développée dans un style justement élégiaque, mais ce n’est qu'en fin d’air qu'il obtient la parfaite justesse de ton, en voix mixte et surtout de tête. C’est le baryton Philippe-Nicolas Martin en Zurga qui domine le plateau masculin. Son instrument se montre solide, sainement et vaillamment projeté et d’une qualité homogène sur l’étendue de la tessiture. Son grand air du troisième acte (« Ô Nadir, tendre ami de mon jeune âge ! ») constitue dans ces conditions l’un des sommets de la soirée, doté d’une forte charge émotionnelle. En Nourabad, la basse Frédéric Caton manque d’ampleur dans ses plus courtes interventions, retirant ainsi de l’autorité au personnage.
Habituel défenseur du répertoire français, Guillaume Tourniaire produit depuis la fosse une direction de qualité, délivrant une musique ostensiblement lente et douce au démarrage, puis qui va crescendo en volume. Le chef varie ensuite tout du long les couleurs et nuances de tempo et d’intensité sonore, sachant faire sonner avec éclat l'Orchestre symphonique Saint-Étienne Loire pour les climax de la partition. Même si l’on perçoit de tout légers décalages sur certains départs, le Chœur lyrique Saint-Étienne Loire préparé par Laurent Touche fait également preuve d’une appréciable attention et met application et énergie dans ses interventions.
Le voyage d'Irma a été pris en charge par l'Opéra de Saint-Étienne.
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