Les Fontaines de Rome et les Pins de Rome, composés par Ottorino Respighi respectivement en 1914 et 1923, ne sont pas si facilement abordable esthétiquement qu’il n’y paraît. L’Orchestre de Radio France est spécialiste du « poème symphonique » au sens large : toute œuvre orchestrale plutôt moderne, descriptive comme un tableau, dans laquelle peut se lire une histoire en filigrane. On se souvient très bien de la Symphonie du Nouveau Monde qu’ils connaissent sur le bout des doigts –littéralement comme figurativement–. Mais qu’ont-ils à apporter dans l’interprétation de ces œuvres, ces descriptions amoureuses de la capitale italienne ? Difficile de rendre hommage à la complexité et l’émotion de la pièce sans parfois tomber, par méprise, dans un style brillant et vantard, un peu pompier.
Avant d’en arriver là, le concert commence sur le Messagesquisse de Pierre Boulez. Jusqu’à l’entracte, les pièces seront choisies autour du violoncelle, et l’œuvre de Boulez ne fait pas exception : sur scène se trouvent sept violoncellistes, dont un soliste au centre, Jérémie Maillard. Tous sont des musiciens de l’ORF, et exécutent le court morceau -seulement sept minutes- avec talent et justesse. La musique sérielle de Boulez, particulièrement en musique de chambre, expose toute la dureté de son écriture par son minimalisme, soulignée par la technicité des modes de jeux choisis et la rythmique aux pièges multiples. Un interprète se retrouve vite mis à nu dans de telles conditions, et pourtant chacun réussi à habiller la pièce avec grâce.
On se demande pourquoi avoir choisi Boulez pour ouvrir ce concert, le contraste d’esthétique et de formation avec ce qui est à venir jurant quelque peu. Le désir de Mikko Franck dans sa direction musicale, celui d’étendre les projets autour de la musique contemporaine à leurs concerts dits plus « classiques », est tout à leur honneur –pas de raison que cet intérêt reste cantonné à des évènements ponctuels et à part, comme tout le cycle qui avait été mis en place autour de Pierre Henry en décembre 2017. Allez savoir si choisir Boulez à ce moment-là est judicieux, c’est en tout cas une prise de risque admirable : c’est sans doute aussi pourquoi la salle est plus vide qu’elle n’aurait dû l’être.