Ce n’est pas sans émotion que Tobias Richter a présenté ce qui sera sa dernière saison à la tête du Grand Théâtre de Genève. À l’issue d’un mandat qui aura duré dix ans, le directeur général pourra tirer sa révérence avec le sentiment du devoir accompli : l’institution genevoise n’a pas souffert du déménagement dans l’Opéra des Nations (structure éphémère qui avait auparavant fait ses preuves à Paris pour la Comédie-Française) et le public va pouvoir retrouver les productions ambitieuses du Grand Théâtre dans ses murs après trois années d’importants travaux de rénovation.
Avant la ré-inauguration de l’établissement place de Neuve, plusieurs nouvelles productions se succèderont à l’Opéra des Nations. Carmen de Georges Bizet ouvrira la saison dans une mise en scène de Reinhild Hoffmann, figure du théâtre dansé. Sous la direction musicale de John Fiore, la voix chaude d’Ekaterina Sergeeva assurera le rôle-titre tandis que le pétulant ténor Sébastien Guèze sera scruté avec attention pour ses débuts en Don José.
Le mois d’octobre verra ensuite les débuts genevois d’une coproduction qui a fait le bonheur du Théâtre des Bouffes du Nord : The Beggar’s Opera de John Gay, sorte de comédie musicale baroque représentant les bas-fonds londoniens, sera donné sous la direction énergique de William Christie et dans les cartons gigantesques de l’ingénieux metteur en scène Robert Carsen. Troisième nouvelle production lyrique de la saison, Boris Godounov de Modest Moussorgski réunira de nouveau le metteur en scène Matthias Hartmann et le maestro Paolo Arrivabeni, après une Bohème épurée qui nous avait particulièrement émus il y a deux ans. Mikhail Petrenko et Alexey Tikhomirov se partageront le rôle-titre. Valeur sûre de la scène genevoise, Melody Louledjian incarnera Xenia. Récente lauréate du Concours Kattenburg, la mezzo-soprano vaudoise Marina Viotti chantera le rôle de Fiodor.
Hilarant opéra dans l’opéra, Viva la Mamma ! accompagnera les fêtes de fin d’année ; Laurent Pelly, fidèle invité à Genève sous le mandat de Tobias Richter, mettra en scène cette coproduction virevoltante qui nous a déjà valu des fous rires à l’Opéra de Lyon. En matrone croassante, régnant au milieu d’une parodie de troupe lyrique qui se décompose au fil de l’intrigue, Laurent Naouri montrera l’étendue insoupçonnée de sa voix de baryton et ses dons de comédien. Dans la fosse, ce ne sera pas l’habituel Orchestre de la Suisse Romande mais l’Orchestre de chambre de Genève qui interprètera la partition de Gaetano Donizetti, sous la direction du jeune chef Gergely Madaras.
Notons enfin que le démantèlement de l’Opéra des Nations et son départ pour la Chine seront précédés d’une production originale dans le théâtre de bois : en janvier, la compagnie de l’Opéra de Pékin viendra proposer un spectacle typiquement chinois autour du Faust de Goethe.
C’est donc au Grand Théâtre, sur la rive gauche, que l’année 2019 se poursuivra. Le public retrouvera la scène place de Neuve à partir du 12 février et ce n’est rien moins que L’Anneau du Nibelung, l’imposante Tétralogie de Richard Wagner, qui ouvrira les festivités. Genève renouera avec la mise en scène sobre de Dieter Dorn (qui nous avait séduit en 2014) et les mélomanes apprécieront la possibilité de suivre le cycle des quatre opéras en l’espace de six jours. Georg Fritzsch officiera à la baguette, devant une distribution qui comptera Mikhail Petrenko, Aleksey Tikhomirov mais surtout la voix éclatante de Petra Lang dans le rôle de Brünnhilde.