Le Château de Versailles propose une saison artistique principalement composée d’opéras et de concerts, mais elle comporte également - pour notre plus grand bonheur - quelques spectacles de danse. Du 8 au 10 avril 2016, l’Opéra Royal de Versailles accueillait ainsi une troupe au style bien défini, le Béjart Ballet Lausanne, compagnie créée par Maurice Béjart à Bruxelles en 1960 sous le nom de Ballet du XXe siècle, renommée en 1987, et aujourd’hui dirigée par un fidèle disciple de Béjart, Gil Roman. La soirée mettait en regard quatre ballets, trois de Maurice Béjart, un de Gil Roman, tous très typés et intéressants tant d’un point de vue chorégraphique qu’expressif. La compagnie réunissant des danseuses et danseurs au talent exceptionnel et aux personnalités flamboyantes porte indéniablement en elle l’âme et la passion de son génial créateur et offre par conséquent au public des moments d’une intensité électrisante. Résultat : deux heures trente de délice absolu !
Le répertoire du Béjart Ballet Lausanne repose sur l'oeuvre de Maurice Béjart. Chaque danseur embauché dans la troupe s’y retrouve donc en connaissance de cause : en plus d’une technique irréprochable, il se doit de cultiver une expressivité particulièrement intense, qualité essentielle pour danser du Béjart.
On en a la confirmation dès la première pièce de la soirée, un ballet intitulé Piaf (1988) en hommage à la grande chanteuse française. Sur des chansons de la Môme, elles aussi débordantes d’expressivité (“Les Mots d’amour”, “Mon manège à moi”, “T’es beau tu sais”, “Mon vieux Lucien” ou encore l’immortel “Non, je ne regrette rien”), les danseurs de la compagnie - les hommes seulement - rendent hommage à cette femme, à cette voix, en incarnant ses textes et ses univers. Béjart explique : “Les hommes - elle les a découverts, aimés, enfantés, sublimés. Les hommes sont sa force, sa joie, son éternité, créés par elle, ils vivent grâce à elle, devenus tous, éternellement, Piaf.” Des photographies de la star surplombent la scène telles des icônes. L’inspiration issue de la musique semble habiter tous les danseurs, les visages et les corps se meuvent comme s’ils étaient animés par la vibration des notes, des mots et des émotions venant de Piaf. Les danseurs pourraient tous être solistes tant ils sont excellents, mais quelques-uns prennent le devant de la scène successivement pour représenter “l’accordéoniste”, l’amant, “le clown” ou “Lucien”, et c’est fantastique. Leur présence est extraordinaire de force et de beauté. On est complètement captivés !