Lionel Meunier a décidément tous les talents. Non content d’être l’inspirateur et la cheville ouvrière du fabuleux Vox Luminis, certainement l’un des plus meilleurs ensembles vocaux du moment dans le répertoire baroque et classique (et la Belgique est incroyablement gâtée sur ce plan avec le Vlaams Radiokoor, le Collegium Vocale Gent ou le Chœur de chambre de Namur), il fait également preuve d’un instinct très sûr pour dénicher des raretés qui sont autant de révélations, comme il parvient à dépoussiérer de façon très convaincante les valeurs sûres du répertoire.
Pour ce concert regroupant le Requiem de Michael Haydn aussi peu connu qu’est célébrissime la Grande Messe en ut mineur K427 de Mozart, les forces rassemblées sur la scène du Palais des Beaux-Arts regroupaient outre Vox Luminis (en grande formation de 32 chanteurs) la petite trentaine d’instrumentistes de l’excellent B’Rock Orchestra.
Au moment où, une fois tous les exécutants et les quatre solistes du chant se retrouvent rassemblés sur la scène, une certaine confusion s’installe à l’entame du Requiem de Haydn. Il n’y a pas de chef d’orchestre visible et on a l’impression que la musique démarre toute seule. En fait, la direction est partagée entre Lionel Meunier installé à l’extrémité du groupe des basses, en haut de la scène, et la Konzertmeisterin Cecilia Bernardini qui indique clairement les attaques de l’archet. Autre moment de trouble : à part le ténor Florian Sievers, aucun des membres du quatuor de solistes ne semble correspondre à sa photo dans le programme. Après un petit moment, on comprend que ces chanteurs – la très agréable soprano, la mezzo aux beaux graves et la basse au timbre un peu léger – sont des membres de Vox Luminis, ce qui en dit long sur la qualité de l’ensemble.
L’œuvre du plus jeune des Haydn est une formidable révélation. Après un Introït véhément et dramatique, le Dies Irae fait entendre un contrepoint aisément maîtrisé avec un magnifique entrelacs de lignes mélodiques. L’œuvre où la maîtrise formelle, vocale et instrumentale (importantes parties de trompettes et de trombones) du compositeur ne fait aucun doute est sans doute le Requiem le plus solaire qui se puisse imaginer. Ce n’est pas la terreur ou la révolte face au tragique de la mort qui domine ici, mais le sentiment tranquille de la foi en une vie future sereine et lumineuse.