Une tournée des Wiener Philharmoniker est toujours un évènement. Après être passés par Lyon en février dernier, les musiciens ont posé leurs valises à Paris pour un concert au Théâtre des Champs-Élysées. C’est donc une salle archi-comble qui a accueilli la phalange autrichienne et son chef Mariss Jansons pour un concert réunissant la Symphonie n° 1 de Schumann et la fameuse Symphonie fantastique de Berlioz, entendue pour la troisième fois en l’espace d’un mois à Paris. Malgré une direction musicale quelquefois en panne d’inspiration, on retiendra surtout l’extraordinaire leçon d’orchestre que nous ont offerte les musiciens viennois.
Le début magistral de la Symphonie n° 1 de Schumann introduit le concert. Les premières notes font entendre dès le début des cuivres souverains et des cordes impressionnantes d’homogénéité. Mariss Jansons est très présent sans être écrasant, laissant la flûte égrener sa gamme quelques mesures avant la partie rapide du mouvement. On le sent d’emblée sûr de lui, et il ne va pas d’ailleurs rester bien longtemps assis sur la chaise installée à son pupitre. Usant intelligemment de sa main gauche pour faire ressortir un contrechant ou équilibrer l’intensité entre les pupitres, il obtient de l’orchestre une fluidité naturelle et sans temps mort. Le deuxième mouvement est bien équilibré : sans en faire trop, l’orchestre et son chef arrivent à émouvoir. Les différentes phrases musicales sont énoncées simplement mais avec engagement. Malgré quelques rigidités à l’instar de premiers temps un peu trop appuyés dans le scherzo, Jansons offre une vision passionnée et résolument romantique de cette Symphonie n° 1, avec un usage raisonné du vibrato et un sens aigu des dynamiques. Le maestro est très bien servi par un orchestre au sommet : le pupitre de violoncelles s’avère extraordinaire de par son fondu sonore et son lyrisme renversant, les cors font preuve d’une douceur et d’une chaleur inouïes dans le troisième mouvement et les fameux hautbois viennois surprennent avec leur sonorité presque nasillarde mais si délicate, si particulière. Les Wiener Philharmoniker témoignent d’une rigueur orchestrale à couper le souffle, sans jamais perdre cette chaleur et ce son soyeux et élégant qui font leur réputation.