Pour le milieu de la saison lyrique, on retrouvait une nouvelle fois Tito Ceccherini à la tête de l’Orchestre du Capitole pour l’Enlèvement au Sérail, après avoir dirigé Béatrice et Bénédict en octobre dernier. Composé en 1782, l’opéra en langue allemande prend place dans le sérail du pacha Sélim dans lequel est emprisonnée Konstanze la promise de Belmonte. Avec cette turquerie classique de l’opéra européen du XVIIIe et XIXe siècles, la mise en scène de Tom Ryser fait le choix du dépoussiérage.
C’est par petites touches que le plateau revisitait Mozart, notamment à l’aide des costumes, co-signés Jean Ichel Angays et Stéphane Laverne, et des décors de David Belugou. Kalachnikovs et costumes coloniaux pour les sbires du pacha, également interprété par Tom Ryser, viennent ponctuellement interroger les rapports occidentaux à l’islam dans le monde contemporain, au-delà de ce qu’avait introduit dans le livret du singspiel de Gottlieb Stephanie. La mansuétude de Sélim en fin de spectacle, lorsqu’il décide de libérer ses prisonniers, est d’autant plus mise en avant, tout comme la prétention occidentale. Les mimiques de Pedrillo renvoient à des danses contemporaines dignes de Pulp Fiction ou de la Macarena. Mais une fois l’effet de surprise passé, cet humour décalé du crâneur peu courageux s’essouffle rapidement. Les décors introductifs et conclusifs sont les plus réussis. Les figurations visuelles de la mer et du bateau renvoient aux artifices du XVIIIe siècle mais restent efficaces. Le palais lui est symbolisé par un ensemble de tapisseries qui sont autant de murs d’accès. Le jeu entre intérieur et extérieur est intéressant, mais les couleurs et les motifs lassent rapidement, et ce malgré les efforts des jeux de lumière (Marc Delamézière). La recherche la plus avancée est certainement celle environnant Sélim. On le voit durant l’ouverture, chausser et habiller ses multiples femmes de façon similaire. Il regarde ensuite un film ancien montrant une jeune femme. On apprendra à la fin qu’il s’agit d’une vision de sa bien-aimée, tuée par le père de Belmonte, gouverneur d’Alger.