A Londres, pas le temps de s’ennuyer à l’arrivée des beaux jours ! Dans l’est de la capitale, le Spitalfields Music Summer Festival a lieu en 2015 du 2 juin au 16 juin, et accueille trois artistes associés pour sa 39ème saison. L’un d’eux n’est autre que l’ensemble baroque La Nuova Musica, fondé en 2007 par son directeur musical David Bates, et révélé au public par une résidence à Snape Maltings (Aldeburgh Music). Le jeudi 4 juin à 19h30, dans la ravissante église de Spitalfields (Christ Church), l’orchestre et le chœur de David Bates ont choisi pour leur première intervention d’interpréter l’un des plus grands oratorios de Haendel, Israël en Egypte (1739). Une restitution décapante, pleine d’énergie et d’ardeur ! Rarement une œuvre sacrée aura paru aussi vivante ; un vrai régal.
Israël en Egypte est l’un des 27 oratorios composés par Haendel ; créé le 4 avril 1739 au King’s Theatre de Londres, il suit de peu Saül. Il est lui aussi chanté en anglais, le texte utilisé étant un assemblage de passages de la Bible (Exode, Psaumes), probablement mis bout à bout par Charles Jennens. La particularité d’Israël en Egypte est de conférer au chœur une place prédominante, alors que dans la plupart des oratorios, les parties solistes sont majoritaires. Mais loin de nuire à l’expressivité de l’œuvre, cette caractéristique permet au compositeur de faire ressortir le drame inhérent au texte, à l’aide d’effets choraux variés et contrastés. Mozart résume parfaitement le résultat obtenu : « Haendel sait mieux que quiconque comment obtenir un effet ; là où il en désire un, il frappe comme la foudre ». C’est donc une musique saisissante, nuancée et captivante, que Haendel nous livre dans cet oratorio en particulier.
La Nuova Musica a les atouts nécessaires pour faire vivre cette musique si prenante, et surtout, un chef qui a compris l’esprit de l’œuvre, une œuvre baroque (dramatique) avant d’être sacrée (esthétique). C’est ce qui se dégage tout au long de leur performance : l’orchestre joue avec beaucoup de joie, une forme de noblesse également, mais toujours portée par un souffle propulseur qui se traduit par un superbe phrasé, des accents énergiques, un rebond exalté. Les musiciens sourient au contact de la partition, respirent avec leur instrument, mettent leur âme au service de l’intensité de l’œuvre. L’implication de chacun est évidente, et elle est exacerbée par la direction extrêmement intelligente de David Bates, qui semble savoir exactement quel ressort expressif de l’orchestre ou du chœur correspond le mieux à chaque note. Si le rendu est d’un naturel confondant, il est évident qu’il découle d’un travail d’une immense minutie. Et quelle excellence à la fin !