En guise de pièce maîtresse du week-end Grèce de la Philharmonie de Paris, l’Orchestre Pasdeloup a conçu un programme hétéroclite, autour de pièces inspirées par différentes figures mythologiques. De Beethoven à Augusta Holmès, les musiciens parcourent près d’un siècle d’écriture symphonique épique et imagée, avec une certaine agilité. Seule ombre au tableau : un Concerto n° 4 de Beethoven finalement un peu hors-sujet, qui détourne l’attention du spectateur de cette construction globale pourtant bien pensée.
Le concert débute avec l’Ouverture des Créatures de Prométhée de Beethoven. Dans le cadre de l’Académie La Maestra, destinée aux cheffes d’orchestre lauréates du concours du même nom l’an passé, l’œuvre est dirigée par la jeune cheffe grecque Eleni Papakyriakou. Avec une gestuelle très précise, voire un peu raide, elle en propose une lecture vigoureuse, au rythme solidement souligné par des accents impeccables, au risque de basculer parfois du côté de la lourdeur. Malgré tout, les timbres qu’elle obtient de certains musiciens, comme les puissantes cordes graves ou l’élégant hautbois, suffisent à retenir l’attention du spectateur.
Ce n’est toutefois qu’un prélude au Concerto pour piano n° 4, relié un peu artificiellement à ce programme mythologique grâce à une vague évocation d’un passage de la légende d’Orphée dans l’Andante con moto. Au piano, Orphée est en l’occurrence François Dumont. Le jeu parfois un peu froid du soliste brille surtout dans les nuances les plus douces, lorsque ses aigus se font lumineux. Ainsi, plutôt qu’à son Allegro moderato dont les traits sont si soigneusement détachés qu’ils en deviennent presque pesants, on s’attachera à son Andante con moto, lorsqu’il parvient à adoucir le son jusqu’à lui donner un aspect voilé et une couleur mystérieuse. Dirigé cette fois par Monika Wolińska, à la gestuelle ample et volubile, l’orchestre fait preuve d’une grande délicatesse dans le premier mouvement : les violons restent moelleux, les bois incroyablement purs. L'ensemble est moins convaincant dans le deuxième, les cordes ne parvenant pas à créer de continuité entre leurs différentes interventions, et dans le finale où les musiciens, cantonnés à un rôle de ponctuation, ne sont pas toujours parfaitement synchronisés. Mais ce que l’on regrette surtout, c’est finalement l’aspect monolithique de l’ensemble, qu’il s’agisse du pianiste qui privilégie parfois la recherche de puissance à celle des contrastes, ou de la cheffe qui ne parvient pas toujours à construire les gradations spectaculaires que permet l’œuvre. Cela n’enlève rien à la grande clarté de cette version ; le public, particulièrement enthousiaste, obtiendra d’ailleurs en bis un mouvement tout aussi maîtrisé de la sonate La Tempête.