C’est avec la rutilante Valse de concert d’Alexandre Glazounov que nous entrons en musique dans une ambiance de salon doré, le Victoria Hall s’y prêtant à merveille…
Alexandre Glazounov est le dernier grand compositeur romantique russe né au milieu du 19ème siècle et mort peu avant le début de la Seconde Guerre Mondiale. On sent bien dans sa musique une certaine opulence renforcée par l’emploi du triangle, de la harpe et des pizzicati. Effet de vagues, flûtes en guirlandes au dessus de la masse orchestrale… Cette grande valse toute de rondeurs et de somptuosité aura eu le seul défaut d’osciller entre mezzo-forte et forte…
Le Concerto pour violon n°2 en ut dièse mineur de Dimitri Chostakovitch, composé au printemps 1967, est dédié à David Oïstrakh. Le moderato initial nous amène dans une ambiance noire et inquiétante avec cette déambulation sinueuse et haletante des basses… Le contrepoint des altos rajoutant à une atmosphère inquiète déjà bien présente. Le concerto déploie alors son vaste discours, mené par un orchestre sur la brèche, merveilleux de concentration, nous livrant une atmosphère idéale, écrin au violon solo…
Frank Peter Zimmermann pare son discours de mille nuances et couleurs, son violon se faisant tour à tour moqueur et mutin, tragique ou lyrique, toujours en phase avec ses collègues d’un soir, se tournant vers eux pour mieux dialoguer, que ce soit avec la flûte ou la clarinette, magnifiques de musicalité, tout comme le cor qui fut magistral du début à la fin de ce concerto !
L’Adagio avec son entrée dans les graves du violon et le beau solo de flûte continue d’imprégner cette fresque d’une sombre couleur d’un hiver pesant et implacable. On note la flûte impeccable de Loïc Schneider, parfait, et toujours la délicatesse du cor solo… On ressent évidemment cette nuit froide et lumineuse, dans ce paysage diaphane et inquiétant.
C’est après une cadence grinçante de cynisme reprise par la trompette moqueuse que le final galope vers la fin de cette ronde incantatoire, parsemée de roulements de batterie ! On retrouve alors bien l’humour du compositeur, aux glissandi évocateurs, jusque dans la cadence finale, virtuosissime, dévoilant l’immense imagination musicale du soliste : véritablement diabolique, on reste saisi par l’aspect rugueux et « tripal » de cette musique très empreinte de son époque et du lieu de sa genèse. La reprise de l’orchestre se fait alors endiablée : chapeau bas au soliste, au chef et à l’Orchestre de la Suisse Romande !