La danse d'Angelin Preljocaj ne fait pas l'unanimité. Loin d'être graphique, souvent abstraite, elle peut parfois même être dure.
Avec Empty Moves, le chorégraphe s’intéresse à l’essence même de la danse, aux pas, à la difficulté physique éprouvée lors de longs enchaînements (ici 1h45) de mouvements. On voit ainsi les quatre danseurs boire sur scène à même la bouteille d’eau.
Pour cette pièce en trois parties (Parts I, II et III - 2004, 2007 et 2014) et donnée ici dans son intégralité, Preljocaj s'appuie sur une performance de John Cage. En 1977, au Teatro Lirico de Milan, John Cage fait une lecture du texte d’Henry David Thoreau, La Désobéissance civile, en transformant le texte en phonèmes et sons. La pièce fait scandale et la représentation, intitulée Empty Words, enregistrée dans son intégralité (et comprenant même les réactions des spectateurs), sert de partition à Angelin Preljocaj. Mais la bande-son faite de paroles et d’invectives donne un côté inachevé à la pièce. Le chorégraphe ne semble pas y rechercher la beauté : les quatre danseurs, en tee-shirt et short aux couleurs acidulées, évoluent sans réel repère rythmique, sans qu’une histoire nous soit réellement racontée ... si ce n'est une danse pure. Arabesques, pas-de-deux, transe, portés parfois violents, parfois sublimes... Les phrases musicales se succèdent sans que l’on arrive à percevoir le sens de ce qui nous est donné à voir… si ce n’est des mouvements.
La chorégraphie fait référence au travail de Merce Cunningham, son maître américain, et l'on remarque aussi certains engagements de l’artiste, comme la dénonciation de la violence faite aux femmes. Certains passages relèvent du sublime et nous transportent, un court instant dans le rêve et la beauté de la danse. Certains phrasés se font parfois coquins, voire humoristiques, dans la partie III : déhanchements se voulant provocateurs, nageurs qui rappellent Pina Bausch, échanges aigre-doux entre les couples.