Institution de plus en plus largement connue au fil des années, la Fondation Palazetto Bru Zane s’est donné entre autres pour mission de donner une deuxième vie (et une deuxième chance) à des œuvres oubliées du XIXe siècle français. Vendredi 11 mars 2016, elle contribuait ainsi à la re-création parisienne de La Jacquerie, opéra d’Edouard Lalo, inédit au disque et au concert depuis plus d’un siècle jusqu’à sa résurrection l’été dernier au Festival de Radio France et Montpellier-Languedoc-Roussillon. A Paris, à l'Auditorium de Radio France, on retrouvait l’Orchestre Philharmonique de Radio France dirigé par Patrick Davin, ainsi que les deux mêmes chanteuses, Véronique Gens et Nora Gubisch ; en revanche, la distribution masculine était renouvelée par rapport à la production montpelliéraine – et elle ne nous a pas déçus. Un opéra de belle facture malgré quelques maladresses dans la construction du propos dramatique et musical.
La Jacquerie est un opéra en quatre actes élaboré par Edouard Lalo entre 1889 et 1892 ; malheureusement, le compositeur meurt brutalement avant d’avoir pu l’achever. L’œuvre est ainsi terminée par Arthur Coquard (1846 - 1910), notamment pour l’orchestration, et elle est finalement créée en 1895 à Monte-Carlo puis à Paris – c’est un grand succès. L’histoire se déroule au Moyen-Age : le titre renvoie à la violente insurrection paysanne qui a eu lieu en 1358. Dans l’opéra, le personnage central est celui qui est désigné pour être le meneur de l’insurrection, Robert ; il est entouré par deux personnages féminins, sa mère Jeanne, qui tente de le retenir auprès d’elle par crainte de le voir mourir au combat, et Blanche de Sainte-Croix, qui elle est dans le camp adverse (celui des nobles), mais tombe cependant amoureuse de Robert après avoir été sauvée par lui. Auprès de Robert, son camarade paysan Guillaume, qui le pousse à l’action. Du côté de Blanche, deux représentants émérites de la noblesse : son père, le Comte de Sainte-Croix, et le Baron de Savigny. Le Sénéchal symbolise la tentative de communication entre les deux classes sociales, aussitôt rompue à peine une fois établie.
Les deux premiers actes présentent les enjeux de l’intrigue et les différents personnages. La majorité du deuxième acte correspond à la désignation de Robert comme le chef des paysans insurgés et la supplication de sa mère de renoncer à cette mission dangereuse, ce qui donne lieu à un dialogue entre mère et fils un peu long sur le plan dramatique. Les actes trois et quatre mettent en scène la révolte, qui se déclenche à l’occasion de la fête du printemps, puis le désarroi des femmes après l’échec des paysans, la mort du Comte de Sainte-Croix, et la disparition de Robert. Peu après, Robert réapparaît, dans le but de retrouver Blanche : au moment seulement où ils font face à la mort pour trahison de leurs camps respectifs à cause de ces retrouvailles, ils s’avouent un amour réciproque (que seul Robert exprimait jusqu’alors).