Lever de rideau... Nous découvrons Barbe-Bleue avec sa femme - du moment - sur un plateau représentant un lit gigantesque. Le décor est posé : dès que les autres personnages apparaissent, nous en avons la confirmation, nous voilà plongés dans une fête aux allures de « pyjama party » !
Offenbach et ses librettistes, Henri Meilhac et Ludovic Halévy, présentent cet opéra satirique qu’est Barbe-Bleue en 1866 sous Napoléon III. Beaucoup s’étonnent, encore aujourd’hui, qu’il n’ait subi aucune censure tant le gouvernement et la société y sont tournés en ridicule tout au long de l'intrigue.
Barbe-Bleue, vassal du Roi Bobèche, se lasse régulièrement de ses femmes et a recours à une méthode radicale pour s'en séparer. Mais son cher Popolani, à qui il délègue cette tâche, ne peut être aussi cruel et ne fait qu’endormir les belles. Le Roi Bobèche, quant à lui, ayant chassé sa fille à la naissance, ne sait pas que la jeune Fleurette est en réalité la Princesse Hermia. Elle est amoureuse du Prince Saphir, qui pour ses beaux yeux se fait passer pour un berger. Mais le successeur au trône du Roi Bobèche ne faisant pas l’affaire, le Comte Oscar est chargé de retrouver la Princesse. Popolani, lui, suit le même chemin pour trouver une nouvelle compagne à Barbe-Bleue. Boulotte, l’heureuse élue fait mauvaise impression à la Cour lors de sa présentation, et le vassal tombe sous le charme de Hermia. Il envoie donc sa nouvelle femme à Popolani et va réclamer la main de la Princesse, battant en duel le Prince Saphir. Mais les élues déchues rejoignent les hommes soupçonnés par le Roi Bobèche d’être les amants de sa Reine Clémentine pour dénoncer Barbe-Bleue. La vie chez Offenbach étant bien faite, tout se finit en fête ! Un mariage général est prononcé et chacun trouve chaussure à son pied.
Dans ce méli-mélo, un narrateur, ici Gordon Wilson, nous aide à suivre le mouvement. Ses interventions sont bien intégrées au contexte et sa magnifique diction nous permet de ne recourir au surtitrage que très rarement.
Le metteur en scène Waut Koeken place ce Barbe-Bleue dans un décor contemporain indéniable, tout en créant une ambiance de rêve, comme dans une petite bulle. Son exploit est d’amener ces éléments modernes tout en nous laissant cette impression de retrouver l’époque d’Offenbach. Il arrive alors à nous démontrer que de tous temps, les décisions à haut niveau sont prises en petits comités et que cela peut nous sembler comme un jeu. Les décors de Yannick Larrivée et les lumières de Glen d’Haenens apportent la cohérence du tout et la poésie du moment. Le plateau est très ingénieux, et de grand lit, devient caveau de Popolani à salon, pour finir en table de banquet. Tout est immense, gigantesque, gargantuesque… dans la démesure qui sert à merveille l’histoire contée.