C’est une « nouvelle mise en scène » – et non une nouvelle production – de Faust que nous propose cette saison l’Opéra de Paris. Exit Jean-Louis Martinoty ; c’est à Jean-Romain Vesperini qu’incombe la lourde tâche de remanier la production de 2011, avec une distribution elle aussi renouvelée.
Parlons tout d’abord du point fort du spectacle : son plateau vocal. À tout seigneur, tout honneur, Piotr Beczala se révèle un Faust juste et convaincant. S’il lui arrive parfois de manquer d’un peu de chaleur et de lumière – on ne peut s’empêcher la comparaison avec Roberto Alagna – l’émotion est là, et la diction est tout à fait claire et intelligible. Les aigus sont plus ouverts et charnus qu’à l’accoutumée, et malgré une légère hésitation dans les premières millisecondes, le contre-ut de la Cavatine « Salut ! Demeure chaste et pure » emplit fièrement la vaste nef de l’Opéra Bastille.
On pouvait de façon légitime se poser la question de l’adéquation entre la voix mature de Krassimira Stoyanova et le personnage de Marguerite. La soprano bulgare y apporte une réponse éclatante qui dissipe tous les doutes. La beauté du timbre et l’agilité de la voix font merveille dans tous les registres du personnage, depuis l’insouciance juvénile de l’Air des bijoux jusqu’aux affres du tourment et de la mort.
Ildar Abdrazakov, en revanche, déçoit quelque peu. Manquant souvent de puissance dans les graves, ce Méphistophélès un peu trop tiède ne parvient jamais à nous séduire ni à nous terrifier. Quant à son élocution, elle laisse parfois à désirer.
Le Valentin de Jean-François Lapointe déborde d’énergie. Que ce soit pour partir au combat (« Avant de quitter ces lieux ») ou pour mourir, il incarne son personnage avec un engagement sans faille, portant ainsi quelques-uns des rares moments de tension dramatique de cette représentation.
N’oublions pas les seconds rôles. Anaïk Morel donne à Siébel tous les attributs vocaux du jeune soupirant fougueux de Marguerite, tandis que Doris Lamprecht, comme à son habitude, est irrésistible, notamment dans le duo de Dame Marthe et Méphistophélès. Le Chœur de l’Opéra de Paris, enfin, remplit bien son rôle, avec application et cohérence.
Dans la fosse, sous la baguette de Michel Plasson, l’Orchestre de l’Opéra de Paris restitue assez bien, dans l’ensemble, les couleurs de cette riche partition. Mais ladite baguette se serait-elle émoussée sous l’effet de la routine ? Les couleurs manquent de lumière et de contraste ; la tension est souvent édulcorée et diluée dans des tempi lents qui mettent à certains moments les chanteurs en difficulté.