Leonardo Garcia Alarcón a offert ce mercredi 29 juin une interprétation exemplaire du Diluvio universale, chef d’œuvre de Falvetti. Aguerris par les nombreuses reprises en concert et par l’enregistrement réalisé en 2011, les solistes, la Cappella Mediterranea et le Chœur de Chambre de Namur sont parvenus ce soir à Versailles à une maîtrise parfaite des ressorts dramatiques de cet oratorio hors du commun, communiquant au public leur complicité et leur plaisir de jouer ensemble. Une grande leçon de musique … et de théâtre !
Il Diluvio fut composé en 1682 à Messine, peut-être à la suite de la guerre sanglante qui venait d’opposer la ville sicilienne au colonisateur espagnol. De manière évidente, si Leonardo Garcia Alarcon met en lumière la violence et l’insoumission que l’œuvre reflète, il choisit aussi de montrer son caractère « insulaire », ouverte aux influences extérieures, et notamment orientales par l’ajout de percussions persanes, ainsi que sa grande proximité avec la musique et le théâtre populaires, proposant par moment de vrais moments de farce. Il parvient ainsi à une forme de spectacle total, d’une très grande richesse de couleurs, de timbres et d’atmosphères différentes, incarnant complétement toutes les dimensions du terme « baroque ». Il faut dire aussi que le chef peut s’appuyer sur des solistes et un chœur de premier ordre, et sur une équipe d’instrumentistes admirables d’engagement et de maîtrise technique.
Avant même le début du concert, on est impressionné par la diversité des forces en présence et par l’intelligence de la disposition : sur la scène, à la place du premier violon des orchestres classiques, se trouve le percussionniste iranien, Keyvan Chemirani. A sa droite, se déploie un vaste continuo composé de deux basses de violes (Margaux Blanchard et Ronald Martin Alonso tous deux excellents), d’un violoncelle et d’une contrebasse, d’un orgue, d’une harpe et de deux luths, une telle richesse assurant une profondeur et une solidité à cette partie fondamentale de toute partition baroque. Derrière, on retrouve les instruments mélodiques : 5 violons (dont l’excellente violoniste Stéphanie De Failly), 2 saqueboutes et 2 cornets jouant également les flûtes à bec.
L’ouverture frappe par le moelleux de la sonorité d’ensemble, les violons notamment maîtrisant parfaitement aussi bien l’intonation délicate des cordes en boyaux que les dynamiques d’archet, conduisant les phrases avec une grande intelligence. Ce plaisir est pourtant interrompu par un homme se levant brutalement du premier rang du public. Il faut une fraction de seconde pour comprendre qu’il s’agit du soliste incarnant la Justice divine. Se déplaçant devant le chef, il est alors rejoint par les solistes représentant les quatre éléments puis par la totalité du chœur, tous chantant devant le chef et l’orchestre, donnant ainsi une grande force dramatique à cette première partie terminée par un tourbillon de vocalises parfaitement déroulées.