Après diverses tentatives (dont un partenariat avec l'Orchestre Français des Jeunes l'été dernier), l'Orchestre Philharmonique de Radio France s'est désormais doté cette année d'une véritable académie qui forme une vingtaine de jeunes musiciens en les intégrant dans ses rangs. Le cadre du Festival Radio France Occitanie Montpellier est idéal pour ce projet, les jeunes talents pouvant y donner deux concerts symphoniques aux côtés des membres du Philhar' ainsi qu'une demi-douzaine de concerts d'ensemble et de musique de chambre. Le premier de ces rendez-vous a eu lieu mercredi au Corum, avec une soirée Mahler où la fraîcheur des jeunes instrumentistes n'est pas passée inaperçue. Il semble même qu’elle a donné un surcroît d’énergie à Mikko Franck, dont tout le monde a bénéficié. Le programme était tout en contrastes : le froid d’abord, avec les Kindertotenlieder, puis le chaud, avec la Quatrième Symphonie.
Ce froid est celui de la mort, la plus terrible des morts, celle de son enfant. C’est la douleur de Friedrich Rückert, qui écrira 428 poèmes autour de cette idée fixe. C’est l’effroi d’Alma Mahler qui voit son mari composer ces lieder alors qu’elle donne naissance à leurs deux enfants. C’est la musique enfin.
Dans le premier des lieder, la voix est contenue dans un registre médium où Marianne Crebassa montre une belle présence, sobre, élégante. Elle se coule avec aisance dans la nudité de la musique, dans la douleur contenue. L’atmosphère d’inquiétude et l'ambiguïté harmonique du deuxième lied, admirablement rendues par l’orchestre, montrent aussi les limites de la chanteuse montpelliéraine : avec le texte sous les yeux, on peine à comprendre les mots. Et les graves sont vraiment trop courts. Sa présence n’y suffit plus. Les deux suivants maintiennent cette division entre un orchestre servant de la musique, et un chant frustrant car si on ne l’entend guère, le timbre est là. Enfin dans In diesem Wetter, in diesem Braus, où le désespoir explose littéralement, le Philhar’ rutile, se déploie, et Marianne Crebassa disparaît, avalée par la puissance de la masse instrumentale. La Berceuse finale, dans sa douceur et sa paix, nous la rendra comme au début – mais un peu tard !