Le Festival de La Chaise-Dieu est financé par des partenaires institutionnels, soit la région, le département et les communes, mais aussi – il est important de le rappeler – par des mécènes locaux, comme la distillerie Pagès du Velay. Organisé avec le soutien du Cercle des partenaires locaux, le concert donné dans l’Abbatiale Saint-Robert mercredi 27 août à 21h réunissait le Collegium Vocale Gent et l’Orchestre des Champs-Élysées sous la direction de Philippe Herreweghe, dans un programme Bruckner/Schubert. Une musique pleine de gravité, proposée avec une intensité quasi tragique par un très grand chef.
Le chœur s’installe d’abord seul sur scène, en arc de cercle. Après une ouverture à l’orgue – une œuvre de Brahms calme et propice à la concentration –, le recueillement prend instantanément possession du public lorsque s’élève l’Ave Maria d'Anton Bruckner, premier des trois motets chantés a cappella. La pureté de la composition va de pair avec la pureté du son choral dont la moindre altération est réglée. L’interprétation du Collegium Vocale Gent n’est pas seulement parfaitement propre, elle est subtilement colorée par un panel de nuances variées, coulées dans la dynamique du texte et du chant, rendant possible l’émergence des différents états de prière. Dans le Christus factus est et le Os justi également, la ferveur qui anime Philippe Herreweghe est palpable dans sa manière de modeler l’éclat des voix, leurs superbes teintes, leurs plus imperceptibles inflexions. L’immense qualité musicale de leur travail ne se traduit pas par une technicité scolaire, bien au contraire ; le chef sait mettre l’exigence de la précision au service du surgissement de l’émotion ardente.
Le chœur quitte ensuite la scène pour laisser place à l’orchestre seul. Les deux mouvements de la Symphonie no. 8 en si mineur, «Inachevée» de Schubert font succéder au calme profond du chant sacré l’angoisse exprimée par l’entremêlement instrumental. Le tempo assez modéré convient bien à l’abbatiale où l’écho semble amplifier les valeurs temporelles. L’engagement des musiciens résulte en une mise en valeur de leur chef, au centre des regards et de l’attention ; c’est comme s’il permettait l’éclosion des thèmes successifs, en maintenant une tension délicate, haletante mais maîtrisée. La performance de l’orchestre, par moments presque trop sérieuse, a pour avantage de restituer avec force la portée tragique de l’œuvre. La coordination impeccable entre les pupitres donne une impression de fluidité très agréable, accentuée par le jeu admirablement souple des bois.