C’est à une monothématique Brahms que nous conviait Emmanuel Krivine, directeur artistique et musical de son orchestre La Chambre Philharmonique. Ancien violoniste professionnel, ancien directeur de l’Orchestre National de Lyon, ce chef est connu pour un florilège de sorties désopilantes, sauf lorsqu’elles vous sont adressées : « Madame violon, le vibrato, c´est comme le maquillage, c'est l'plaisir des moches... »
Cependant il reste le talent de l’artiste et du chef et les répétitions restent de vrais moments de réflexion musicale, ne lâchant jamais rien, et remettant sur le métier des partitions jusqu’à obtenir ce qu’il souhaite, argumentant, donnant des exemples, afin d’obtenir sa vision de l’œuvre. C’est dans une belle concentration que nous entrons dans ce concerto de Brahms si connu, avec en remplacement de la lunaire Patricia Kopatchinskaja, le violoniste bulgare Svetlin Roussev, élève de Gérard Poulet, Devy Erlih et Jean-Jacques Kantorow. Taille élégante, costume soulignant une ligne féline, le soliste joue le Stradivarius « Camposelice » de 1710, et est renommé pour son jeu sur instrument d’époque… En effet tout au long du concerto, on aura apprécié une élégance racée soulignée par une belle éloquence répondant aux sollicitations d’un Krivine plein d’énergie, insufflant la vie à son orchestre au son dit « d’époque »… Chaque phrasé est délicatement ciselé, Svetlin Roussev rendra particulièrement bien la nostalgie brumeuse du deuxième mouvement, nonobstant un son définitivement peu convaincant d’un hautbois solo peu sensible et uniformément trop fort, tout comme sa comparse, la flûte solo. Et malgré les arabesques d’Emmanuel Krivine totalement investi, dirigeant parfois même du pied les retenues expressives, l’orchestre sonne bien peu « brahmsien », et de la gangue tant attendue, les cordes offrirent des aplats bien mornes et stériles… on reste circonspect de ce manque de velouté, de cette absence de vibrato dans Brahms. Malgré tout, la dernière cavalcade aura offert une bien belle énergie et ravis les mélomanes au son du violon subtil de Svetlin Roussev.