À l’annonce de l’été, de la Saint-Jean et des chaleurs torrides, le festival de musique sacrée de Nice met à l’honneur les réjouissances que délivrent les danses baroques. Au programme, la rencontre impossible entre Georg Friedrich Haendel (et ses Water Music) et la Suite n° 3 pour orchestre de Johann Sebastian Bach. Bien qu’ayant vécu à la même époque, ces deux compositeurs de renom n’ont jamais eu l’occasion de se rencontrer... Le rendez-vous a donc tout de même lieu plus de deux siècles plus tard, sous l’égide de Jérôme Correas à la baguette de l’Orchestre Philharmonique de Nice.
Il n’est pas vingt heures que les instrumentistes prennent place sur scène, surplombant du regard l’église entièrement occupée, et Violaine Darmon, dans le rôle de premier violon, donne l’accord à chacun des musiciens présents.
Dès les premières notes de la Water Music (Première Suite), les violons se montrent légers et entrainants, privilégiant une approche divertissante de l’ouvrage. L’ensemble – sur instruments modernes – paraît homogène, bien que les violoncelles et contrebasses s’adonnent à certains moments à des coups d’archet un peu lourds. Les dialogues entre les pupitres se succèdent avec une fluidité remarquable, tandis que le basson se révèle par sa tenue régulière de la pulsation globale. On apprécie les jeux d’écho et de spatialisation qui se forment entre les musiciens, à l’instar du son du hautbois émergeant au loin dans l’Andante. Les ornements sont utilisés avec parcimonie, seuls quelques trilles font surface au cœur des danses de la suite. Si le tout est équilibré, plutôt sobre et maîtrisé, l’enthousiasme du chef est contagieux, transportant le public dans un tourbillon de joie et d’allégresse.
Vient ensuite l’heure de la Suite pour orchestre n° 3 de Bach. Comme de coutume à l’âge baroque, la direction s’effectue du clavecin. Correas use de sa main gauche pour sculpter les dynamiques à l’aide de gestes expressifs. Rapidement, l’instrument se fait couvrir dans les passages en tutti : on aurait aimé la présence d’un autre instrument à cordes pincées afin de renforcer le continuo dans ces pages. Le célèbre Air est subtilement exécuté, évitant de tomber dans un lyrisme exacerbé. La polyphonie caractéristique de Bach est mise en lumière par une énergie constamment alimentée par le premier violon, dont la passion pour le répertoire se ressent dans chaque coup d’archet. Les quelques aspérités qui parsèment les mouvements ne sont nullement dérangeantes : elles rendent au contraire la musique bien vivante.