Foule des grands soirs au Victoria Hall pour accueillir ce premier concert de la série « Symphonie » de l’Orchestre de la Suisse Romande, entièrement dédié à Ravel dont on commémore les 80 ans de la disparition.
En guise de hors-d’œuvre, une œuvre rare et extraordinairement courte de 1918, arrangée en 2007 par Pierre Boulez : Frontispice. Originellement conçue pour deux pianos à cinq mains, elle aiguise la curiosité par une polytonalité surprenante, avec cette mélodie persistante à la basse. Trois minutes de musique à peine et nous voilà embarqué pour le noir Concerto pour la main gauche avec sa sinueuse ligne grave introductive s’épanouissant dans un tutti éclatant. Entre alors le piano du soliste de ce soir : Alexandre Tharaud. On est frappé par sa ligne frêle, imprimant avec force les premiers instants de l’œuvre. S’ensuit tout au long du concert un balancement entre d'une part un beau dialogue entre le pianiste et les vents, et d'autre part un instrument soliste couvert par un orchestre débordant. On citera néanmoins, parmi les beautés indéniables du concerto, le cor anglais mordoré d’Alexandre Emard et le basson aux phrasés envoutants d’Afonso Venturieri, ainsi que les sons perlés du pianiste dans les passages intimistes qui lui conviennent infiniment plus que les moments plus massifs, lors desquels des sonorités vertes et des sons durs émaillent ses interventions.