Wim Vandekeybus présente sa dernière création Speak low if you speak love (2015) au Festival 100% au Parc de la Villette. Le chorégraphe belge s’associe au musicien et compositeur Mauro Pawlowski et à la chanteuse de jazz sud-africaine Tutu Poane pour concevoir un spectacle où les performances chorégraphique et musicale se rencontrent sur scène dans des tableaux aussi mystérieux que fracassants.
Le démarrage cru de Speak low if you speak love nous précipite dans un déchaînement de violence physique et psychique. Les danseurs, visages voilés et à demi-nus, s’élancent dans des ébats sexuellement très suggestifs et d’une grande brutalité, accompagnés par le chant aérien de Tutu Poane. Les corps souffrent, s’entrechoquent, se rompent, s’achoppent les uns sur les autres, comme aimantés par une force instinctive, impérative.Mais rapidement, cette gravité initiale s’estompe pour changer de registre et laisser place à une succession de tableaux plus malicieux, plus fantasques. Vêtus de robes-chemisiers rouges, les danseurs se lancent dans une danse endiablée, marquée par de formidables séries de bonds et un génial passage de claquettes. Par la suite, un danseur, rendu fou par une voix murmurant dans sa tête, s’attaque à toute âme qui vive autour de lui, avant de se rendre compte que son destrier – incarné avec beaucoup d’humour par une danseuse – est à l’origine de ce son insidieux. La violence et un certain instinct morbide ne restent cependant jamais loin, avec une alternance de moments d’agressivité inouïs, notamment envers le corps féminin, et des espiègleries plus enfantines quoique toujours malveillantes. Une jeune danseuse s’amuse à se dénuder devant un homme embarrassé, faisant tomber sa culotte à répétition et souriant de sa pudeur. Comme témoins de cette errance psychologique, les trois musiciens sur scène, dont Mauro Pawlowski, ainsi que la chanteuse Tutu Poane assistent et participent à la mise en scène. Poane interpelle d’ailleurs par instants les danseurs, et les rappelle à l’ordre avec humour.