La Cité de la Musique offre en ce moment un cycle passionnant autour de la Nature : Tempêtes et Tremblements, du 30 mars au 10 avril. Beaucoup de baroque, mais pas que : la musique romantique à programme occupe une large partie du répertoire joué, avec des œuvres bien connues du grand public (la Symphonie Pastorale de Beethoven et Les Hébrides de Mendelssohn) et moins connues (des opéras rarement donnés depuis leur création : Herculanum de Félicien David, et Le Dernier Jour de Pompéi de Victorin de Joncières).
Le concert de ce soir était consacré à une œuvre longtemps attribué à Purcell seul : The Tempest, d’après William Shakespeare. Il faut savoir qu’au dix-neuvième siècle, l’opéra n’était pas la forme fixe que l’on connait aujourd’hui : la narration servait dans certains cas de prétexte, de trame de fond pour enchaîner les poèmes et les musiques d’un ou plusieurs compositeurs qui se rapprochaient du thème de l’œuvre. Les numéros étaient interchangeables, selon la volonté des chanteurs et, quelque fois, du public. L’effort du New London Consort, sous la direction de Philip Pickett, a donc été de reconstituer les conditions d’exécution de ce genre d’opéra tel qu’il pouvait être joué en 1700 : l’ensemble instrumental sur scène, aux côtés des chanteurs, sans aucune mise en scène, enchaînant les numéros comme s’il s’agissait d’un concert plus conventionnel.
Tout d’abord, nous devons saluer la précision scientifique derrière tout le travail qui a mené à cette représentation : nous pouvons lire dans le livret tous les détails sur la recherche qui a amené à cette compilation de courtes pièces de Matthew Locke, John Banister, Henry Purcell, John Weldon, Giovanni Battista Draghi. Notons que le New London Consort fait partie de ces ensembles qui ont à cœur de faire vivre un répertoire non publié, oublié ou reconstitué. L’idée est de construire les concerts de façon à lier érudition et divertissement. L’opéra baroque, par sa nature changeante et sa constante évolution, est le format idéal pour ce genre d’exercice. Ceci dit, nous pouvons nous interroger sur les bénéfices d’un opéra sans mise en scène. Il est évident que cela nous rapproche des conditions d’époque, mais dans un monde où la capacité de concentration est un talent en voie de disparition, il est difficile de concevoir un concert de courtes pièces qui dure le temps d’un opéra, aussi ingénieux soient les enchaînements des pièces choisies. Un long livret ne remplace pas la prise de parole ou les déplacements sur scènes qui permettent de reposer l’esprit.