C’est à une sorte de messe trans-générationnelle que nous étions conviés ce vendredi 2 septembre au soir pour fêter l’ouverture du Festival de La Bâtie 2016, avec John Adams , à la composition et direction. Une foule assez bigarrée se pressait dans un Victoria Hall totalement « full » pour écouter cette mono thématique autour du Pape de la musique contemporaine ! il est vrai que sa musique est moderne mais néanmoins plus qu’accessible et on se souvient d’un récent Harmonielehre qui fit sensation en ces mêmes murs il y a peu. Traversée du temps avec en ouverture le court Shaker loops de 1978, Short Ride in a Fast Machine de 1986 et enfin Scheherazade.2 de 1994 : en somme, de la musique du siècle passé !
Ouverture de concert avec Short Ride in a Fast Machine, musique qui vous revigore d’entrée de jeu. On y retrouve un des aspect de la musique de John Adams : un penchant pour l’évocateur et le cinématographique. On est dans l’efficacité des effets, la prise directe avec les tripes en convoquant la richesse des timbres de l’orchestre. La musique de John Adams est pensée, intelligente ; elle révèle une foule de lectures, tel un prisme réfléchissant la lumière. L’entrée des woodblocks et des tournoiements de vents en font une vaste course dont on ressent la richesse expressive : sensations !
Dans Shaker Loops issu d’un quatuor à cordes intitulé Wavemaker, l’écriture, telle une transe, est faite d’effets d’écho sur un motif qui paraît infini, avec de petits accrocs de-ci de-là, aux altos ou contrebasses. La ronde infinie s’apaise dans un bel aplat aux réminiscentes stridences ponticelliennes ou flageollantes… Cette musique aux rondeurs presque indiennes, peut rappeler dans ses ambiances Le songe d’une nuit d’été de Britten. Le temps s’étire, les boucles se font plus larges ; elles se concluent dans une apothéose sonore en ronde sur-aigüe d’un effet saisissant.
C’est avec Scheherazade.2 que John Adams dirige Leila Josefowicz, violoniste dont le tempérament rappellera celui de la fameuse héroïne. Cette dernière lutta contre l’absolutisme religieux pour finir par s’enfuir, après avoir conté les Mille et une nuits. Un beau conte pour une épopée palpitante ! La musique, plus narrative que les deux précédentes propose une très belle fresque, orientalisée par l’emploi, attendu, du cymbalum et cet omniprésent violon, en osmose avec l’orchestre. La musique est assurément cinématographique, d’une puissance si évocatrice que Ridley Scott ne la bouderait pas pour ses films ! La scène d’amour évoque d'abord brutalement, puis suavement, des douceurs presque ravéliennes. Une sorte de guimauve qui s’alanguit, devient acidulée, avant de revenir aux moiteurs éthérées. On a entendu un « c’est joli ! » d’une gentille jeune femme assise à côté ; effectivement.