Alors que la semaine de la mode vient de se terminer à Paris, c’est l’Opéra Comédie de Montpellier qui avait ce soir une allure de podium de défilé. Pourtant pas de grand nom de la couture à l’affiche mais plutôt une œuvre rare et ô combien délicieuse de Jules Massenet : Chérubin.
Créée en 1905 à l’Opéra de Monte-Carlo, l’œuvre présente l’image de l’insatiable séducteur qui s’enivre auprès de toutes les femmes. Finalement, parce que la morale doit triompher, le fougueux Chérubin se range au coté d’une jeune fille (Nina) qui n’attendait que lui. Saluons la magnifique initiative de l’Opéra National de Montpellier de présenter cette partition rare en ouverture de sa nouvelle saison lyrique.
La mise en scène présentée par Juliette Deschamps a le mérite d’être véritablement engagée et cohérente sur la durée de l’œuvre. Sur le plateau, c’est une sorte de maison stylisée et colorée en forme de boîte à chaussure qui sert de décor unique à cette mise en scène. Des parasols, un plongeoir de piscine en arrière-scène, deux grandes tables et des bancs complètent cette scénographie délicieusement « vintage ». Les costumes très travaillés de Vanessa Sannino sont très fantasques et burlesques. Les couleurs sont vives, les formes et les matières sont mélangées avec talent. Jusque là tout allait bien.
Juliette Deschamps joue la carte de l’ambiguïté sexuelle des personnages. En effet, Chérubin est un jeune homme chanté, comme souvent à l’opéra, par une femme. Qu’à cela ne tienne, la metteur en scène fait porter au protagoniste principal un smoking avec des talons et des cheveux longs. Tous les autres personnages sont également affublés de costumes ou d’une gestuelle ambiguë. Exit les stéréotypes de la masculinité, tous les chanteurs hommes sont à la limite de l’autre sexe. Pour exemple, le philosophe est ici vêtu d’un tutu avec une veste de smoking.
Très vite, le spectacle tourne au défilé et l’on comprend que le visuel devra l’emporter sur l’auditif. Tous les personnages sont paralysés d’une gestuelle peu naturelle et qui manque cruellement de spontanéité. Les bras sont souvent statiques, en l’air. Les bustes droits et la démarche digne d’un podium. Surtout, l’œil est constamment attiré vers des chorégraphies au demeurant agréables mais qui n’apportent pas grand chose (si ce n’est pour servir cette esthétique très « couture ») à la trame dramatique.