On se souviendra longtemps du dernier concert de l'édition 2019 du Festival de La Chaise-Dieu. En ce dimanche 1er septembre à l’abbatiale Saint-Robert, l’Accademia Bizantina s’est réunie autour de la contralto Delphine Galou pour un programme consacré en grande partie à Vivaldi, reflet de deux disques dont « Agitata » a reçu les louanges d’une presse unanime.
Dès les premières notes, on est saisi par le son d’ensemble de ces chambristes dont la précision et le caractère organique du geste musical sont la signature. L’évidence des tempos, portée par la direction discrète mais efficace d'Ottavio Dantone au claviorganum, installe une couleur parfaitement adaptée à l’acoustique du lieu. La voix de la contralto rassemble un faisceau de qualités rarement (si jamais) réunies et déjà sensibles dans l’Introduzione al Miserere. Deuxième volet de ce motet incomplet, l’aria descriptive « Sileant Zephyri » présente une diversité des couleurs, un art de l’ornementation d’une ductilité infinie. L’écrin instrumental accueille un chant attentif à la moindre proposition poétique.
Ici comme dans la plupart des pièces (dont l’envoûtant Betulia liberata de Jommelli), la voix se mêle avec un art fascinant aux propositions des cordes à la manière d’une grande chanteuse de jazz, prolongeant les infinies suggestions de l’harmonie environnante, osant de subtils décalages tout en se jouant des grands intervalles avec un chic inimitable. L’instrument n’est certes pas très puissant, son grave n’est pas abyssal mais la fusion des registres et l’incarnation du texte demeurent saisissants.
L’air de Juditha triumphans est à cet égard un tour de force où l’orchestre met en valeur les couleurs moirées de la contralto en étageant de subtils plans sonores, des dynamiques très étudiées. Le motet In procella sine stella confirme le charisme de la jeune artiste et l’élégance accomplie de la direction d’Ottavio Dantone : maîtrise de l’agogique, naturel des respirations et des changements de tempo attestent une complicité rare.