La nouvelle édition du prestigieux festival de Montpellier offre, selon la tradition, des propositions inédites comme les 550 sonates pour clavecin de Scarlatti données en 35 concerts, 30 clavecinistes dans 13 lieux différents, une première dans le cadre d’un festival ! Une découverte promise parmi d’autres heureuses surprises aura été la création de Kassya, le dernier opéra inachevé de Léo Delibes (1836-1891), donné en version de concert samedi 21 juillet à l’Opéra Berlioz.
Annoncé dans la programmation de la saison 1887-1888 de l’Opéra Comique, Kassya voit ses représentations annulées en raison du violent incendie qui ravage la salle Favart en mai 1887 et fait de nombreuses victimes. Delibes, affaibli, renonce à terminer son ouvrage et meurt brutalement en laissant une partition piano-chant partiellement orchestrée que Jules Massenet va reprendre pour la compléter et l’orchestrer entièrement en introduisant des récitatifs en remplacement des dialogues parlés d’origine. Cet opéra posthume en 4 actes sera finalement créé en 1893, mais, après 8 représentations, accueilli de manière réservée par la critique et le public dont le goût avait évolué, Kassya est retiré de l’affiche et tombe dans l’oubli pour des décennies. L’heureuse initiative du Festival a permis de redonner vie à l’œuvre de Delibes, célèbre surtout pour sa musique de ballet dont La Source, Coppélia, Sylvia et pour Lakmé, son unique opéra qui rencontra un vif succès auprès des mélomanes sensibles à la virtuosité vocale accordée à l’héroïne.
Le livret de Kassya est signé par deux auteurs notoires, à la plume alerte, Henri Meilhac connu entre autres pour Carmen et Philippe Gille pour Lakmé. Ils ont écrit le texte à partir d’une nouvelle de Sacher-Masoch dont ils ont quelque peu modifié l’intrigue. L’action se déroule en Galicie, dans un village au pied des montagnes carpates que Delibes avait découvertes peu avant tout comme l’univers musical et la culture populaire des Czardas dont le compositeur fera usage dans certains passages de la partition et en particulier dans sa conception de l’héroïne. La trame évoque l’histoire de Kassya, belle et sensuelle Bohémienne, aimée de Cyrille, jeune et valeureux paysan qu’elle aime en retour. Mais, elle le délaisse, séduite par les avances du puissant et tyrannique comte de Zévale qui règne sur la région. Bien qu’ayant gagné le cœur de Kassya, ce dernier contraint Cyrille à s’engager dans les armées impériales afin de l’éloigner de son élue. A son retour, après deux ans d’absence, Cyrille retrouve son père dans la misère. Révolté par l’oppression exercée par les aristocrates sur les pauvres, il incite les paysans à se révolter et parvient à renverser le régime imposé par le comte et ses seigneurs. Kassya devenue comtesse se révèle aussi cruelle que son époux, pourtant Cyrille la sauve de la rage vengeresse des paysans. Désemparée, perdue, Kassya tente de reconquérir son ancien amoureux, mais en vain. Cyrille, lucide, épouse la douce Sonia, son amie d’enfance qui l’a toujours aimé. Kassya seule et abandonnée se donne la mort par désespoir.