Le concert s’ouvre avec le Concerto pour violon n° 2 de Béla Bartók, mettant ainsi à l’honneur l’artiste associé de l’Auditorium-Orchestre national de Lyon, le violoniste Renaud Capuçon. Le son de son instrument captive de suite l’oreille de l’auditeur par son jeu très à la corde, produisant un timbre très puissant. L’investissement du musicien ne se réduit pas à la pression de son archet sur les cordes – constamment et parfaitement maîtrisée – mais également des doigts de sa main gauche, que l’on entend même parfois frapper les cordes avec assurance et détermination. Musicalement, ce premier mouvement « Allegro non troppo » sonne donc avec toute l’assurance et le grain de son que l’on pourrait attendre de cette œuvre aux inspirations musicales des pays de l’Est.
L’investissement musical et physique du soliste contraste avec le calme du jeune chef polonais Krzysztof Urbański, aux mouvements de pas parfois doucement dansés. Le son de l’orchestre est alors tout autant différent : loin de la franchise du son de Renaud Capuçon, le sien possède beaucoup plus de rondeur – certainement exagérées, voire contraire aux inspirations tziganes. Cette différence s’estompe toutefois au cours du mouvement, se montrant capable de passages tout à fait saisissants. La cadence du violoniste sait garder toute l’attention du public, impressionné par cette technique impeccable qui aurait sans doute été plus appréciée si l’aspect « machine virtuose » était moins prononcé.
Ce regret se confirme lors du deuxième mouvement : si les émotions du violoniste sont visibles et que son jeu est indéniablement superbe, on souhaiterait une transmission de ses intentions plus évidente, plus réellement partagée avec le public. La présence de la partition, que Capuçon doit pourtant connaître par cœur, constitue-t-elle cet obstacle ? La direction du chef se montre toujours aussi souple, caressant le son de ses mains. Il semble néanmoins que les musiciens aient davantage besoin de précision, d’où des incertitudes entre vents et cordes et surtout des pizzicati de violons pas du tout en place. Dans l’« Allegro molto », malgré l’engagement du soliste qui sollicite un tempo plus allant, l’orchestre semble souvent à la traîne, retardé par les (réelles) difficultés de la partition. Cette difficulté est encore plus grande pour le soliste, dont on saisit toutefois la moindre note. Pour remercier le public de ses chaleureux applaudissements, Renaud Capuçon invite le chef d’attaque des premiers violons, Giovanni Radivo, à interpréter avec lui trois des Duos pour deux violons de Bartók avec malice et virtuosité, admirables jusque dans la présence des pizzicati.