Lieu phare du Festival Berlioz, la cour du château Louis XI de La Côte-Saint-André accueille ce soir Le Cercle de l’Harmonie, avec Jérémie Rhorer à la baguette, accompagné du jeune altiste Paul Zientara en soliste. Entre champs et villages, l’événement prend place en plein cœur de la ville natale du compositeur. Sous la toile couvrant la scène et les gradins du parc du château, le public bouillonne d’impatience sous une température dépassant les 40°C.

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Le Cercle de l'Harmonie dirigé par Jérémie Rhorer
© Festival Berlioz / Bruno Moussier

Tout commence de manière titanesque, par l’ouverture Les Créatures de Prométhée op. 43 de Beethoven. On y découvre la sonorité ronde et chaleureuse de l'orchestre jouant sur instruments d’époque. Les crescendos et surprises dynamiques ponctuent avec allégresse le discours sonore. L’aspect pastoral et les fines nuances piano réalisées viennent sublimer l’exécution. Le tout est pimpant, tout à fait dans l’esprit de l’œuvre. Mis en lumière tout au long de la soirée, le pupitre d’alto est placé tout à droite de la scène, faisant face aux premiers violons.

Le spectacle se poursuit avec le très attendu Harold en Italie de Berlioz. Le début sombre et inquiétant prépare une montée en tension dramatique jusqu’à l’arrivée du soliste. Dans son rôle de rêveur mélancolique, l’alto principal se montre fragile, à fleur de peau, presque timide. Paul Zientara prend en effet le parti d’un Harold poète et contemplatif plutôt que de donner dans l’ardeur berliozienne. Son vibrato est sobre, les dialogues avec l’orchestre sont raffinés. Exit toute démonstration de virtuosité, l’orchestre en deviendrait presque le personnage principal – le jeu expressif de l’ensemble apporte d'ailleurs une profondeur certaine à l’interprétation.

Paul Zientara et Le Cercle de l'Harmonie dirigé par Jérémie Rhorer © Festival Berlioz / Bruno Moussier
Paul Zientara et Le Cercle de l'Harmonie dirigé par Jérémie Rhorer
© Festival Berlioz / Bruno Moussier

Ce choix interprétatif semble converger avec l’idée initiale du compositeur : bien que composant pour le fameux Paganini, Berlioz avait davantage en tête un personnage-wanderer intégré dans le paysage de l'orchestre qu’un musicien en proie à des démonstrations solitaires, tel qu’il le raconte dans ses Mémoires. Jérémie Rhorer montre quant à lui une direction précise et retenue, guidant l'orchestre avec passion et assurant la cohésion entre les musiciens. L’interprétation est solide, arborant en permanence des dynamiques mouvantes, s'appuyant sur les débuts de phrases et se relâchant sur leurs fins. Mention spéciale pour le deuxième mouvement (la Marche des pèlerins), dont l’atmosphère suspendue est particulièrement convaincante.

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Jérémie Rhorer
© Festival Berlioz / Bruno Moussier

Après un entracte nécessaire dans ces conditions caniculaires, vient ensuite la Symphonie en ut, œuvre de jeunesse de Bizet, qui n’avait que 17 ans lors de sa composition ! Animé par la fraîcheur et le caractère enjoué de la pièce, l’orchestre s’adonne à une interprétation primesautière des lignes mélodiques. Parfois, les entrées des instruments sont légèrement abruptes, ce qui altère un peu la fluidité de certaines transitions. Il n’empêche, l’équilibre d’ensemble, notamment lors des passages sollicitant les percussions, est bien respecté. On apprécie également les interventions des hautbois, remarquables par leur gestion du souffle, conduisant à des phrasés legato particulièrement fluides. Alternant entre climats festifs et plus intérieurs, l’ensemble retranscrit l’énergie et la fougue de l’artiste à l’âge adolescent.

En résumé, la performance du Cercle de l’Harmonie sous la direction de Jérémie Rhorer a offert pléthore de moments de fougue et de poésie, largement récompensés par de chaleureux applaudissements.


Le voyage de Manon a été pris en charge par le Festival Berlioz.

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