Autour de la figure beethovénienne, l'ONCT recevait le chef danois Thomas Søndergård, habitué des grands orchestres européens et nord-américains et promoteur du répertoire scandinave. Le programme, intitulé « intemporel, insurmontable : Beethoven » intégrait tout de même, dans le schéma classique ouverture-concerto-symphonie, le Concerto en la mineur pour violon et orchestre d'Antonin Dvořák, avec comme soliste le jeune virtuose tchèque Josef Špaček, artiste associé de l'Orchestre Philharmonique Tchèque.
Les premiers coups de semonce de l'ouverture d'Egmond, posent une atmosphère noble et grave correspondant au double personnage, historique (1522-1568) et littéraire (Goethe 1788), de la figure éponyme. L'héroïsation de l'individu est perceptible dans la musique composée par Beethoven en 1810 : les excitations épiques occupent rapidement la partition, tout comme elles animent la direction énergique du chef d'orchestre.
On rejoint ensuite d'autres contrées et atmosphères avec le concerto de Dvořák. Les deux premiers mouvements enchaînés laissent place à une démonstration de technicité. L’enchaînement de positions très hautes, alliées à un vibrato extrêmement expressif magnifient l'entrée en matière avec un discours du violon dramatique et teinté des harmonies réminiscentes d'Europe centrale. Le bouillonnement de l'orchestre est parfaitement contenu et chacune des doubles cordes est rendue intelligible et chantante par Josef Špaček. Il entame avec entrain les nombreux jeux de dialogue, notamment avec les violoncelles. Le deuxième mouvement Adagio ma non troppo réveille les affects du public avec un récitatif des plus romantiques, à la fois lunaire et rustique. Le début de l'Allegro respecte bien l'indication « giocoso » proposée par le compositeur. Le dialogue s'éclaircit plus encore entre le soliste et les pizzicati des alti. La répétition du thème, renforcée par l'utilisation des timbales, développe le caractère traditionnel du langage de Dvořák sans toutefois tomber dans la lourdeur. Marches, alternances de nuances, contretemps, jeu marcato ne sombrent jamais dans le parodique ou l'exagération. Le concerto est exécuté avec une extrême finesse, que ce soit dans la direction de Thomas Søndergård ou encore dans la gestuelle de Josef Špaček, expressive mais non surjouée. C'est le sourire aux lèvres que la course finale est exécutée. Ovationné par le public, le virtuose propose un très bel extrait des sonates pour violon seul d'Eugène Ysaÿe.
Si Beethoven peut à bon droit revendiquer le titre de père des Romantiques et d'explorateur de formes musicales nouvelles, il n'est en rien un révolutionnaire ayant fait table rase de l'héritage musical du passé, bien au contraire. Sa Symphonie n°4 en si bémol majeur en est un parfait exemple. L'Adagio – Allegro vivace dégage les premières vagues orchestrales puissantes de la soirée. La phraséologie musicale de l'Adagio n'est pas sans rappeler Mozart et implique une direction d'une grande rigueur de la part de Thomas Søndergård. Sans être plus fade que le concerto, la Symphonie n°4 fait montre de couleurs musicales moins vives, qui trouvent néanmoins une compensation dans le rythme et la puissance des fortissimi. La place est également plus largement donnée aux vents et aux individualités timbriques dans l'Allegro vivace, intéressante alternative à la prépondérance accordée aux cordes dans le concerto. Le mouvement continu des cordes dans l'Allegro ma non troppo permet tout de même à l'orage d'éclater dans la plus calme des symphonies du compositeur.