La nouvelle saison de l'Opéra de Dijon s'ouvre sur une célébration des 250 ans de la mort de Jean-Philippe Rameau. Rameau est né à Dijon en 1683, où son père était organiste dans plusieurs églises de la ville. Rameau revint à Dijon en 1709, après avoir étudié à Milan et travaillé à Paris, pour reprendre le travail de son père.

Cette nouvelle saison lui rend hommage à travers ce qui est certainement son plus célèbre opéra Castor et Pollux, une coproduction déjà présentée au English National Opera et au Komische Oper Berlin, dirigée par le chef australien Barrie Kosky. Le Concert d’Astrée est dirigé par Emmanuelle Haïm, experte en la matière, avec Pascal Charbonneau et Henk Neven dans le rôle des frères jumeaux, tous deux amoureux de la princesse Télaïre (Emmanuelle de Negri). Ce trio amoureux est encadré par Télaïre, et sa soeur Phoebe (Gaëlle Arquez), elles-mêmes toutes deux amoureuses de Castor. C'est une production qui a suscité déjà bien des débats chez ses spectateurs. Interprétée par des spécialistes de la musique Baroque, cette production promet une expérience musicale passionante.

Haïm est également prête pour une “journée de pure folie” le 14 septembre prochain où Rameau sera célébré avec un après-midi et une soirée qui accueilleront concerts, ateliers participatifs, cours de danse, ... dans “Let's celebrate Rameau!”.

Peu ont autant donné à la musique baroque française que William Christie et Les Arts Florissants, avec leurs productions tout en chant et en danse. Ils apportent leur propre touche de joie de vivre (en français dans le texte) à Rameau dans leur Daphnis et Eglé, pastorale héroïque en un acte, et ballet La Naissance d’Osiris. La soprano Sophie Daneman, déjà coutumière des Arts Florissants, dirige.

Deux thématiques importantes rythment la saison. En mars, Résistance nous plonge dans la musique écrite par des compositeurs juifs détenus en camps de concentration nazis pendant la Seconde Guerre Mondiale. Viktor Ullmann, Pavel Haas, Hans Krása et Gideon Klein furent tous déportés à Theresienstadt, où ils continuèrent à composer. Erwin Schulhoff fut déporté au camp de Wülzburg, où il mourut en 1942. Tous ces composeurs sont donc programmés cette saison.

L'opéra d'Ullmann Der Kaiser von Atlantis (L'Empereur dAtlantis) également intitulé “La Désobéissance de la Mort” fut composé en 1943. Pendant les répétitions de 1944, les autorités nazies considerèrent l'opéra comme une satire d'Adolf Hitler et interdirent toute représentation. Il fallut attendre 1975 pour la Première, à Amsterdam. Schulhoff, Haas et Klein seront présentés par les Pavel Haas Quartet et Bennewitz Quartet en récitals pour quatuor à cordes. L'opéra pour enfants de Krása Brundibár, précédant l'ouverture de la saison Résistance, sera présenté par la Maîtrise de Dijon à La Minoterie.

La musique tchèque est un autre fil conducteur fort de cette saison, dominée par un printemps qui célèbre Bohème et Moravie. Toute saison qui met la musique tchèque à l'honneur serait incomplète sans Leoš Janáček ou Antonín Dvořák, c'est pourquoi chacun de ces compositeurs sera fortement présent. L'opéra de Janáček Káťa Kabanová, inspiré de la pièce de Ostrovsky&rsquo La Tempête, raconte les confessions déchirantes d'une femme mariée qui, rongée par la culpabilité d'avoir trompé son mari, se jette dans la Volga après être passée aux aveux.

Cet opéra est largement inspiré de l'obsession de Janáček pour la très jeune (et mariée) Kamila Stösslová. Laurent Joyeux, dont la production du Ring à l'opéra de Dijon fut un franc succès, dirige.

La soprano moscovite Tatiana Monogarova, célèbre pour ses interprétations des héroïnes de Tchaikovsky (Tatyana, Lisa and Iolanta), prend ici le rôle de Káťa. La Mezzo Katya Starke interprète sa belle-mère malveillante Kabanicha. Le Czech Virtuosi, souvent décrit comme ‘une version moravienne des Dissonances’ (orchestre en résidence à géométrie variable), est dans la fosse.

Pour sa saison orchestrale, l'opéra de Dijon rassemble plusieurs interprètes sur instruments d'époque. Smetana, Dvořák and Janáček sont assurés par Anima Eterna, et dirigés par Jos van Immerseel. De quoi rafraichir de vaillants chevaux de bataille comme Vltava, la Symphonie du Nouveau Monde et la Sinfonietta de Janáček. D'autres instruments d'époque à venir avec Dvořák que Philippe Herreweghe et son Orchestre des Champs-Elysées attaqueront par le Stabat Mater. Mozart, ayant eu des liens étroits avec Prague, est au coeur d'un programme fascinant du Concerto Köln intitulé Classics in Prague, où sa Symphonie "Prague" figure aux côtés d'un concerto pour piano de Dussek (joué par Andreas Staier) et d'une symphonie de Rosetti.

Le Christmas Mass de Jakub Jan Ryba est extrêmement populaire en République Tchèque. Le Choeur de l'Opéra de Dijon présente cette incroyable pièce le 6 décembre.

Les oeuvres tchèques pour musique de chambre incluent Dvořák du Pavel Haas au Artemis Quartets. Chacun des qutuors à cordes de Janáček – oeuvres de grande intensité – sera proposé en récital par un quatuor des Dissonances, alors que son chef-d'oeuvre pour piano In the mists sera joué par Dénes Várjon.

Les compositeurs tchèques seront explorés à travers les siècles, de Zelenka (joué avec Vivaldi ‘in Bohemia’) à Mysliveček en passant par Bohuslav Martinů et Petr Eben. Dijon risque d'être une vitrine pragoise la saison prochaine !