En ce deuxième jour, le Festival de Saintes a retrouvé son centre névralgique, l'abbatiale de l'Abbaye aux Dames, pour un concert de son orchestre en résidence, le « JOA » (Jeune Orchestre de l'Abbaye). Fondé il y a plus de vingt ans, cet ensemble a pour vocation de permettre à de jeunes musiciens en fin d'études ou en début de carrière de faire leurs débuts et de se former à l'interprétation du répertoire classique et romantique sur des instruments d'époque. Placés sous la direction d'Alessandro Moccia, violon solo de l'Orchestre des Champs-Élysées, les jeunes instrumentistes proposaient un programme ardu, à la charnière de leurs deux répertoires de prédilection : la Symphonie n° 34 de Mozart et la Symphonie n° 104 « Londres » de Haydn. Nul besoin de chef d'orchestre pour ce répertoire : si Alessandro Moccia dirige le JOA, c'est d'un regard et depuis le pupitre des premiers violons. La présence attentive du soliste, qui témoigne d'un engagement corporel à toute épreuve, semble néanmoins porter l'orchestre et lui donner son élan.
Dès les premières notes de l'« Allegro vivace » de la Symphonie n° 34 de Mozart, l'énergie des musiciens est communicative. Le tempo est pris à toute allure mais l'exécution est d'une grande clarté, soulignant tantôt le badinage gracieux des violons et des vents, tantôt le dialogue des cordes au sein des pupitres divisés. L'interprétation met en valeur le caractère narratif et quasi-opératique de la partition : exubérants et pétillants, les différents pupitres semblent autant de personnages qui se donnent la réplique au sein d'un opéra bouffe sans paroles. Les interventions des hautbois sont particulièrement délicates et gracieuses, notamment dans le second mouvement « Andante di molto », où la ligne des violons se fait rêveuse et éthérée. Que l'on se situe au niveau de la phrase ou au niveau de la forme globale, le traitement des contrastes est saisissant : chaque nuance est un coup de théâtre, chaque silence est une surprise. Si l'on pourrait objecter qu'à force de brio, l'interprétation manque par moments d'ampleur, il n'en reste pas moins que le JOA fait de la symphonie de Mozart une course haletante qui laisse l'auditeur tout interdit quand s'évanouissent les dernières notes du finale.