Pour une ville qui ne figure pas même dans le top 10 français, la production musicale et opératique de Dijon ne fait pas pâle figure aux côtés de ses aînés – l’Opéra de Dijon s’est fixé des objectifs pour le moins ambitieux, autant en termes d’audace que de diversification. Dans la foulée du mini Ring de 2013-14, du programme de la saison 2015-16 qui réunissait Cherubini et Britten, en passant par l’opéra-bouffe rossinien, la saison 2016-17 offrira une diversité encore supérieure, que ce soit dans ses opéras ou ses programmes de concert.

Ne vous méprenez pas : si vous cherchez à tout prix les grands opéras romantiques, ce n’est pas à Dijon que vous les trouverez. Vous aurez en revanche le choix de l’ancien, du moderne, de l’étrange, le tout magnifié par une distribution souvent prestigieuse. Ne ratez donc pas Emmanuelle Haïm et son Concert d’Astrée, qui viendront au printemps prochain compléter leur cycle Monteverdi avec Il ritorno d’Ulisse in patria, Rolando Villazón et Magdalena Kožená dans les rôles principaux (Haïm et Kožená joueront également Charpentier et Rameau en Décembre). Un autre ensemble baroque de prestige, Les Traversées Baroques, donneront L’Orfeo en septembre, tandis que les très réputés Talens Lyriques de Christophe Rousset, joueront par cinq fois Die Zauberflöte en mars – le seul titre de cette liste à figurer dans les « classiques », une production chantée en allemand qui promet d’être d’une grande exactitude historique. Enfin, La Clémence de Titus sera l’objet de performances gratuites en juin dans le Grand Théâtre de Dijon ; une offre qui veut s’adresser à un nouveau public.

Nabucco aussi sera de la partie, mais pas celui que vous connaissez. Ce Nabucco-là a été écrit au XVIIIème siècle par Michelangelo Falvetti ; sans compter que le chef argentin Leonardo Garcia Alarcón va adjoindre des instruments orientaux à la performance du 3 mai. Pour les enfants, il y a Little Nemo – de même, ne vous méprenez pas : ce Little Nemo se base sur le personnage de cartoon Winsor McCay’s, un petit garçon qui voyage toutes les nuits de son lit jusqu’au Royaume de Slumberland. Le compositeur David Chaillon nous explique : « qu’au travers de ses rêves, Little Nemo initie les jeunes aux différents genres musicaux et à l’infinie richesse de l’opéra. » (David Chaillou par ailleurs, n’est pas le premier compositeur à adapter ces vignettes à la scène : Daron Hagen l’avait fait en 2011 pour l’Opéra de Sarasota). En janvier, nous retrouvons le mythe d’Orphée dans sa version par Gluck, Orphée et Eurydice, tandis que l’opéra-bouffe prendra la forme d’une transcription pour deux pianos du cocasse Gianni Schicchi, farce carabinée signée Puccini, à paraître en avril au Grand Théâtre.

Le plus exotique sans doute sera Kalîla wa Dimna, lequel pourra être aperçu au festival d’Aix-en-Provence dès juillet 2016. Ce nom pourra sonner bien mystérieux à nos oreilles actuelles ; il l’aurait sans doute moins été à celles de nos ancêtres, notamment au XIXème siècle ; à l’époque, le sanskrit Panchatantra était l’un des recueils d’histoires les plus lus et les plus traduits de tout temps. Moneim Adwan, compositeur originaire de Gaza, mêle formalisme occidental et musique d’Orient, fable et tragédie, le monde arabe à la francophonie.

Ne laissez pas le nom « Opéra de Dijon » vous induire en erreur : la compagnie organise bien plus de concerts que d’opéras. Considérant que l’Auditorium de Dijon – malgré un intérieur un peu austère – est une salle doublement confortable et acoustiquement excellente, la saison des concerts vaut très certainement le détour.

Cette année, l’Amérique occupe une place de choix dans nos programmes. Une thématique qui culmine le 9 décembre avec le concert du London Symphony Orchestra sous la direction du compositeur John Adams, dans l’une de ses œuvres les plus politiquement engagées, le concerto pour violon Schéhérazade.2. La partie de soliste sera assumée par Leila Josefowicz, pour qui la pièce a été écrite. Jos van Immerseel et son ensemble Anima Eterna Brugge exploreront en mars la composante plus légère du répertoire américain à l’occasion d’un concert consacré aux œuvres les plus appréciées de Georges Gershwin (le pianiste Bert van Caenegem maîtrise aussi bien le jazz que le classique, soyez prêts à entendre un authentique Steinway des années Gershwin), tandis qu’un concert intitulé « I got rhythm », le 7 janvier, d’après l’œuvre de Gershwin explorera le répertoire de clarinette. Le Quatuor Tana s’engagera dans le versant expérimental de la musique américaine à l’occasion d’un concert titré « New-York », qui comptera le WTC 9/11 de Steve Reich aux côtés d’œuvres de Carter, Glass et Cage.

En ce qui concerne les musiciens américains : ne ratez pas le récital de Nicholas Angelich, le 12 octobre. Le programme, composé de Schumann, Chopin et Liszt a été passé en revue par Sylvain Gaulhiac, lequel a été particulièrement touché par le calme et l’économie musicale du pianiste, qui s’en tient à l’essentiel. N’oublions pas deux autres récitals, très attendus, de Roger Muraro et de Radu Lupu.

Le chœur ne chômera pas ; non seulement devra-t-il assumer la charge des opéras mais également une série de concerts chorals : gare à ne pas manquer la Petite Messe Solennelle de Rossini en septembre (qui ouvrira la saison), la Création de Haydn en novembre, le Requiem de Fauré en Juin, ainsi que quelques concerts Bach, à la fois à l’Auditorium et à l’Eglise du Sacré-Cœur Saint-Jean-Bosco de Dijon. Enfin, il faudra compter Philippe Herreweghe parmi les invités de marque de la saison, lequel sera accompagné du Collegium Vocale Gent (pour un Requiem Allemand de Brahms) et le RIAS Kammerchor pour l’Oratorio de Noël de J-S Bach.

La saison comptera une poignée de ballets, dont on retiendra plus particulièrement les deux suivants : une performance de « Salue pour moi tout le monde », une création de la chorégraphe Joëlle Bouvier pour le Ballet du Grand Théâtre de Genève. Inspiré par le mythe de Tristan und Isolde, elle sera illustrée par la musique de Wagner : une production qui mêle beauté du geste orchestique, intelligence des décors et un fort dramatisme.

Toujours en lien avec la thématique sur l’Amérique, le Ballet de l’Opéra de Lyon ramènera un programme postmoderne à Dijon. Moins connu et peu joué en France, le Movement for movement's sake de Merce Cunningham’s et son approche particulière de la chorégraphie est parfaitement incarnée ici dans Winterbaum, présenté aux côtés de Dance, l’œuvre emblématique d’une autre pionnière du postmodernisme, Lucinda Childs.

Permettons-nous de mentionner, même de manière fugitive, le programme orchestral, qui comptera outre quelques invités de marque, des performances des orchestres locaux (Les Dissonances et l’Orchestre Dijon-Bourgogne notamment) ainsi que plusieurs concerts de musique de chambre et récitals. Une saison, en somme, qui ne laissera personne en reste.

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Cet article a été sponsorisé par l'Opéra de Dijon